cabécou n. m.
〈Ariège, Haute-Garonne, Tarn, Tarn-et-Garonne, Lot, Aveyron, Lozère, Cantal, Dordogne〉 usuel "petit fromage au lait de chèvre, en forme de mince galette". – Fromages régionaux et Cabécou du Fel (Menus du terroir. “L’Aveyron dans votre assiette”, 1998 [restaurant du Fel, près d’Entraygues]). Cabécou de Rocamadour sur toast (Le Monde, 1er octobre 1998, 20). Les cabecous, rocamadours pour les intimes (Madame Figaro, 19 août 2000, 45). Cabécous d’un chevrier bio [à Villefranche-sur-Rouergue] (Le Monde, 19 octobre 2000, 31).
1. Ils étaient tous devant un verre de prune. Le repas était fini. On avait trempé la
soupe, fait chabrot*, mangé une omelette aux truffes, englouti un confit d’oie, attaqué le petit salé,
épuisé le plateau de cabécous et défoncé quatre bouteillons de Parnac. (J. Vautrin, Billy-ze-Kick, 1974, 100 [La scène est située dans le Quercy].)
2. […] prévoir une énorme quantité de fromage sur un grand plat (du Roquefort surtout,
car on aurait vergogne* de servir des cabécous à ceux qui vous en portent*) : découper le fromage de tête, enfourner quelque gâteau, tirer le vin à la barrique,
dans le sombre de la cave… (M.-P. Grégoire, « La foire », Revue du Rouergue 32, 1978, 40.)
3. […] ronds cabécous dont les courts cylindres aplatis indiquent qu’ils ont été modelés par quelque forme
domestique […]. (A. Merlin et A.-Y. Beaujour, Les Mangeurs de Rouergue, 1978, 139.)
4. – Il faut casser la croûte pour faire descendre ce vin-là.
En un tour de main le saucisson sorti de la cendre et le cabecou de la chèvre sont sur la table. (J. Jaussely, Deux saisons en paradis, 1979, 54.) 5. – […] une fricassée de poulet aux girolles avec quelques pommes de terre sautées à
la graisse d’oie ; une petite salade à l’huile de noix et des cabécous dont vous me direz des nouvelles. (R. Deforges, La Bicyclette bleue, 1981, 322.)
6. Dans le Lot, aux contreforts de l’Auvergne, règnent les chèvres. Les « cabecous » de Rocamadour, moelleux, crémeux ou secs, se mangent à tous les stades, de toutes
les façons : trempés dans l’Armagnac, confits dans une feuille de châtaignier, macérés
dans le marc et poivrés. (Le Monde Dimanche, 4 juillet 1982, VI.)
7. Côté étal [à un stand de fromages du marché de Cahors], les fromages soigneusement
rangés dans des caissettes en PVC disparaissent à vue d’œil. Côté clients, on s’aligne
parfois jusque dans la rue voisine… De quoi devenir chèvre avant d’atteindre les cabecous. Frais, affinés, enveloppés dans des feuilles de châtaigniers, ils côtoient les petits
fromages de vache. (La Bonne Cuisine, septembre 1996, 69.)
8. Après quelques verres de fel [= vin rouge des collines du Fel, au nord-ouest d’Entraygues, Aveyron], un bout de
saucisse sèche, un morceau de cabécou et un moment de rêverie au bord du Dourdou, tout est redevenu limpide ; la fermentation
du vin, la maturation du fromage auraient leurs équivalents dans la cuisine humaine.
(Fr. Graveline, L’Invention du Massif Central, 1997, 104.)
9. C’est un petit fromage rond, à peine plus grand qu’une pièce de monnaie. Le rocamadour,
la crème des « cabécous », est un fromage de chèvre au lait cru, très fier d’avoir décroché en 1996 une appellation
d’origine contrôlée (AOC), comme son illustre voisin de Roquefort. (Le Monde, 21 octobre 1998, 14.)
V. encore s.v. artison, ex. 5.
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
10. […] le Villefranchois offre ses « tripous »*, tripes de veau, ses « cabécous », fromages de chèvre, et sa fouace*, variété de brioche. (Pays et gens de France, n° 66, l’Aveyron, 27 janvier 1983, 20.)
— Au sing. à valeur générique.
11. […] le fameux cabécou de Rocamadour, crémeux à souhait. (É. de Meurville & M. Creignou, Le Guide des gourmands 1991, 1990, 234.)
12. La réhabilitation du cabécou [doit] beaucoup aux « beatniks » qui ont su promouvoir ce fromage de chèvre […]. (A. Lebaube, « Travailler à la campagne », Le Monde des initiatives d’emploi, 3 juillet 1993, 1.)
13. La grandeur [= la taille] du cabécou est fonction de la faisselle, à la fois moule et égouttoir. Avant la Grande Guerre
les faisselles avaient environ 9 cm ½ de diamètre extérieur pour une hauteur de 4 cm
½. Elles sont ensuite passées à 7 cm ½ sur 3 cm ½. (G. Bazalgues, « Le Cabécou de Rocamadour », Quercy-Recherche 77, juin-août 1994, 42.)
14. Chaque année, 490 tonnes de cabécou sont produites dans le triangle formé par les localités de Rocamadour, Gramat et
Carlucet. (Encyclopédie des fromages, 1997, 62.)
□ Dans un commentaire métalinguistique incident.
15. Fromage encore, mais cette fois de chèvre, appelé cabecou. Tout poudré de pollens jaunâtres que la famille nommait les artisons*.
– Des bêtes petites, petites, expliqua Céleste, qui rendent le fromage meilleur. (J. Anglade, La Soupe à la fourchette, 1996 [1994], 65-66.) ■ graphie. La graphie habituelle est aujourd’hui cabécou.
■ encyclopédie. On distingue le cabécou d’Entraygues (nord de l’Aveyron), le cabécou du Quercy-Rouergue (produit sur l’ensemble des contreforts du Massif Central), le cabécou de Rocamadour et le cabécou du Périgord. Voir G. de Balzagues, « Le cabécou de Rocamadour », Quercy-Recherche, n° 77, juin-août 1994, 37-43 ; Encyclopédie des fromages, 1997, 62-62 ; L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France, Midi-Pyrénées, 1996, 207-209 ; id. Aquitaine, 1997, 249-250.
■ remarques. Par dédiminutivation 〈Corrèze (Brive)〉 très fam. à connotation argotique cabec n. m. "fromage (en général)" (dep. 1970, v. FEW 22/1, 310a).
◆◆ commentaire. Attesté dep. 1853 dans le Cantal (« Les chèvres, fort nombreuses dans certaines communes, y procurent la fabrication d’un
fromage assez délicat et de très-petit volume qui porte le nom de cabecou et dont Desmarets a parlé sous le nom de chabrillou » DéribierCantal t. 2, 17) ; 1857 (« Les chèvres sont très-nombreuses dans la commune ; c’est avec leur lait qu’on façonne
ces petits fromages ou cabecous si estimés des gourmets », DéribierCantal, t. 5, 448) ; 1898, probablement sous une plume aveyronnaise (« Je veux faire Marchand de fromage et il y a quelque jour que je cherchez à me procurer
une adresse de quelquun qui pourrait men fournir directement […] c’est des fromage
des Cabecoux que je vous demande […] » Lettre de Charles Raynal, Saint-Denis [Seine], à Louis Cambonie, épicier à Couzou
[Lot], reproduite dans G. Bazalgues, « Le Cabécou de Rocamadour », Quercy-Recherche 77, juin-août 1994, 41, et dont on a respecté la graphie) ; 1903 dans Affre, qui
le marque comme dialectal (« de délicieux petits fromages appelés cabecous en patois » et « cabecous du Fel et du Nayrac » Affre, 92 et 202). Le mot est un transfert d’occ. régional cabecou, surtout attesté, d’après FEW, en Rouergue et sur ses marges : VayssierAveyr 1879
« cobecóu, cabecóu […] petit fromage fait surtout au printemps avec le lait des chèvres et des brebis » ; cf. ALLOc 1004 k ò b é k u : Lot, sauf au sud où le mot est senti comme étranger au parler local (et venant
de Rocamadour), AveyronN., et spor., dans TarnNE. ; ALMC 1103, pts 38, 39 ; 1933 Curnonsky
et A. Croze, Trésor gastronomique de France (d’après Inventaire Midi-Pyrénées, 1996, 208). Il représente sans doute une variante de cabrecou, lequel est attesté en 1906 dans le Cantal, « fromage spécial appelé cabrecou », Notice 2, 11 ; cf. k a b r i ‘ k u, ALMC 1103, pt 25). Ignoré par la lexicographie générale (à l’exception de NPR 2000),
cabécou est peu pris en compte par les glossaires régionaux ; il est en cours de dérégionalisation.
◇◇ bibliographie. BoisgontierMidiPyr 1992 ; PruilhèreAuv 1993 cabicou ; PolverelLozère 1994 ; FEW 2, 297a, capra et 22/1, 310a ‘fromage’.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Ariège, Aveyron, Haute-Garonne, Lot, Tarn, Tarn-et-Garonne,
100 %.
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