crique n. f.
〈Ain, Rhône, Loire (sud), Isère (Villeneuve-de-Marc), Drôme, Ardèche, Haute-Loire (Velay)〉 usuel "galette de pommes de terre crues râpées, mêlée d’œufs battus, éventuellement enrichie
de divers éléments (oignons, lardons, etc.), assaisonnée et frite à la poêle". Synon. région. millassou*, râpé/rapée*. – Une crique réussie doit être craquante sur les bords et moelleuse au centre (MazaMariac 1992). Crique aux lardons / 25 F 00 pièce (Affichette dans une vitrine de la rue de Brest, à Lyon, 26 mai 1997).
1. – Je ne savais que préparer pour le dîner*, alors j’ai fait des criques et des cardons avec le jus du poulet qui reste d’hier. (Ch. Exbrayat, Félicité de la Croix-Rousse, 1988 [1968], 22.)
2. […] ma grand-mère […] faisait aussi des omelettes très cuites, épaisses, du genre
étouffe-chrétien, fourrées, selon l’humeur, de sardines fraîches, de poireaux, de
lardons, d’épinards, etc. Enfin, lorsque j’avais été sage, j’avais droit à réclamer
les criques. (R.-J. Courtine, La Cuisine des terroirs, 1989, 534.)
3. Si vous trouvez – ou préparez – des caillettes* « riches », c’est-à-dire plus « viandues » qu’herbées, alors pourquoi ne pas les servir, bien chaudes, sur une crique ardéchoise ? Il s’agit de pommes de terre râpées à cru, bien égouttées et séchées,
mêlées d’une gousse d’ail également râpée, d’un soupçon de lard toujours râpé, poivrées,
salées, le tout lié d’un œuf bien battu. Le mélange de la pâte obtenue, mis en boulettes,
pressé à la main et aplati, faites rissoler les criques dans l’huile d’olive. Egouttez bien. Une caillette là-dessus, c’est tout un folklore dans l’assiette ! (Le Monde sans visa, 4 mai 1991, 19.)
4. De la daurade au saint-péray aux criques accompagnant la poularde à la crème, quels délices ! (Le Monde sans visa, 7 septembre 1991, 14 [à propos d’un restaurant d’Antraigues, Ardèche].)
□ Avec un commentaire métalinguistique incident. Spécialité de criques (galettes de pommes de terre) le soir (Le Guide rouge 2000, 2000, 1669 [Restaurant de Vienne, Isère]).
5. La crique est un plat très répandu en Haute Ardèche, qui consiste à râper des pommes de terre
crues, et à les faire cuire comme une omelette avec ou sans œufs. La crique n’est pas connue depuis très longtemps dans notre région. (FaraçaVans 1992, 113.)
6. La crique maternelle, une galette poêlée que l’on faisait du côté de Lamastre [Ardèche], avec
la pomme de terre râpée, l’ail, le persil, un jaune d’œuf. (J.-Cl. Ribaut, Le Monde Temps libre, 3 décembre 1994, VI.)
□ En emploi autonymique.
7. Charles [Exbrayat] ne dédaigne pas de saisir la queue de la poêle quand un de ses
amis vient le surprendre. Sa préparation préférée est la râpée* de pommes de terre, en honneur dans toute la vallée de la Haute-Loire, de Saint-Étienne
au Puy, et que les Lyonnais ont adoptée sous le nom de « crique ». (F. Benoît et H. Clos-Jouve, Forez, Velay insolites et gourmands, 1979, 67.)
■ dér. et comp.
1. 〈Ardèche〉 criquette n. f. "petite crique". Je préfère les criquettes à la crique ; c’est plus gras, mais on est sûr que le milieu
est toujours cuit (MédélicePrivas 1981). Attesté en référence à l’Ardèche, dep. 1927 (HöflerRézArtCulin).
2. 〈Ardèche (Annonay)〉 criqzza n.f. "(synon. commercial de crique)". « […] criqzzas, sandwiches / […] criqzzas et pizzas de 34 à 48 F » (Le Réveil du Vivarais et de la Vallée du Rhône, 2 juillet 1997, 9). Mot valise (formé de crique et pizza), néologisme promotionnel de la restauration rapide.
◆◆ commentaire. Attesté dep. 1897 en référence à l’Ardèche (« Omelette du Vivarais ou crique » D. Seignobos, dans HöflerRézArtCulin, dans les parlers dialectaux dep. 1983 seulement
(FeliceChambonL 1983 D-196), connu depuis peu dans le sud ardéchois (v. ici ex. 5),
absent des relevés lexicographiques concernant le français de Lyon jusqu’en 1995,
crique apparaît comme un mot de diffusion récente dans le français de la sphère d’influence
immédiate de Lyon. Une certaine dérégionalisation du terme et du référent est commencée
par le biais de la grande distribution (des criques sous-vide sont proposées dans divers commerces de Belfort). Le mot a été rapporté
(dep. FeliceChambonL 1983) à FEW 2, 1336a-b, krikk- ; il se motiverait sur le caractère craquant des bords de cette préparation.
◇◇ bibliographie. BaronRiveGier 1939 ; RLiR 42 (1978), 187 ; MédélicePrivas 1981 ; DufaudLLouvesc 1986
s.v. crica (dans la métalangue) ; MartinPilat 1989 « usuel à partir de 20 ans » ; FaraçaVans 1992, 113 (dans la métalangue, pour gloser occ. crica) et 460 (index français) ; MazaMariac 1992 ; BlancVilleneuveM 1993 ; FréchetMartVelay
1993 « mot de l’extrémité est du domaine » ; FréchetAnnonay 1995 « usuel […] ; régionalisme sémantique » (peu clair) ; SalmonLyon 1995 (avec un exemple [oral] de 1985) ; FréchetDrôme 1997 ;
NPR 2000 (sans indication diatopique).
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Ardèche, Drôme, Haute-Loire, Rhône, 100 % ; Isère, 80 % ;
Loire, 40 % ; Ain, 30 %.
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