dalle n. f.
I. 〈Normandie〉 vieilli "évier en pierre dans l’habitat rural traditionnel". Synon. région. bassie*, pierre* à eau/d’eau, pile*. – À la ferme on avait une vieille dalle en pierre (BrasseurNorm 1990).
□ Avec ou dans un commentaire métalinguistique incident.
1. « Y avait [dans l’arrière-cuisine] un évier / mais c’était une grosse pierre / qui faisait
évier / ça s’appellait une dalle / je crois que certains ont dû garder le mot » En effet, un témoin qui raconte les aménagements modernes de sa maison confie : « On avait remis une petite dalle / un petit évier/ une dalle » (M. Schortz, Le Parler de Senneville-sur-Fécamp, 1998, 123.)
II. 〈Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, Centre-Ouest, Indre-et-Loire, Haute-Garonne, Puy-de-Dôme
(Thiers), Dordogne, Lot-et-Garonne, Gers, Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques, Landes,
Gironde〉 usuel "conduit horizontal qui reçoit les eaux de pluie du toit et les conduit au tuyau de
descente ; tuyau de descente des eaux"a. Stand. gouttière. Synon. région. chéneau*, gargouille*. – Il faudrait que je fasse changer les dalles de ma maison, elles fuient comme des paniers (PotteAuvThiers 1993). Vous avez un toit, ah ben il a pas de dalle (Homme, 40 ans, Le Grand Pressigny, Indre-et-Loire, dans SimonSimTour 1995).
a « C’est aussi, dans les villes, la partie qui traverse le trottoir et amène les eaux
au ruisseau » (BoisgontierAquit 1991).
2. […] corps de logis principal à un étage, en appareil de grande pierre grise taillée,
sous sa tuile romaine blonde plantée d’une douzaine de cheminées, à pans coupés sur
les pignons, le faîteau en tuile ronde vernissée de La Chapelle-des-Pots verte, la
dalle courant sur le mur. (M. Massian, La Santonine, 1970, 153.)
3. […] on se mit en devoir de creuser des citernes pour recueillir les eaux des gouttières.
Tout un réseau de « dalles » en fer blanc fut posé au rebord des toits pour collecter les eaux de pluie […]. (A. Gaillard,
Le Siècle trioulais, 1979, t. 2, 345.)
V. encore s.v. ponne, ex. 7.
■ remarques. Dal’alu est la raison sociale d’une entreprise de couverture-zinguerie du Fenouiller (Vendée).
◆◆ commentaire.
I. Ce type lexical, attesté en ce sens dep. 1331 en Normandie (v. FEW), où il est aussi
signalé par Huet (Tilladet 2, 124) et Du Pineau ca 1750, est encore en usage dans le français de l’est de la Basse-Normandie (où il
a aussi été relevé dans les patois, v. ALN 963* : des enquêtes partielles l’ont relevé
surtout en Seine-MaritimeO, EureO, CalvadosE, OrneNE) ; enregistré par Cotgr 1611,
probablement d’après une source régionale, il ne s’est pas maintenu dans le français
commun et est absent des dictionnaires généraux contemporains.
II. Analogique du précédent, ce sens est attesté dep. le début du 19e s. dans la région nantaise et en Dordogne, et il est aujourd’hui en usage dans le
quart sud-ouest de la France ; mais il est bien antérieur si l’on tient compte de
sa présence dans le français de Haïti (« Ce bois n’est bon à rien si ce n’est à faire des gouttières, des chêneaux ou dalles
comme on les appelle dans le pays » AnonymeHippolyteF ca 1800, f. 118a) et surtout du Québec où, attesté dep. le 17e sièclea, il est encore bien connu (GPFC 1930 ; DQA 1992 ; ALEC q. 20 et 21 ; Lavoie 1985,
q. 1883). Accueilli sans marque par Littré 1863 et Lar 1870, il est absent de Rob 1985,
NPR 1993-2000 et Lar 2000, et indiqué comme « région. » par TLF, sans autre illustration qu’un renvoi à deux dictionnaires techniques de
1881 et 1884.
a « Sera laissé deux ouvertures dans la cave […], pour placer des dales à esgouter les
eaues, auxquelles ouvertures sera mis des pierres qui debouteront d’un pied au moins,
pour placer lesdites dales », 1684 Arch. nat. du Québec, FichierTLFQ).
◇◇ bibliographie. (I) DuPineauC [ca 1750] ; MazeHavre 1903 ; BarbeLouviers 1907 ; Dieppe 1952 ; LepelleyBasseNorm 1989 ;
BrasseurNorm 1990 ; LepelleyNormandie 1993 ; FEW 15/2, 49a-b, dæla. – (II) LeGonidecBret 1819 ; Nantes ca 1820 ; BrasseurHérault [1823] ; JBLGironde 1823 ; 1902 (« le nommé Thiollet […], zingueur […] était à poser une dalle contre une maison de la
rue du Lycée », Journal de l’Ouest, n° 100, 30 avril) ; VerrOnillAnjou 1908 ; 1917 à Rabastens (Tarn) « passer la peinture aux contre-vents et à la dale [sic] de la maison qui sans doute doit être bien rouillée », dans G. Bacconnier et al., La Plume au fusil, 1985, 290 ; RougéTouraine 1931 ; RLiR 42 (1978), 167 (Puy-de-Dôme) ; RézeauOuest
1984 et 1990 ; SPM 1990 ; BoisgontierAquit 1991 « ce régionalisme, très vivant, […] passe le plus souvent inaperçu » ; PotteAuvThiers 1993 [mais inconnu de plusieurs témoins thiernois] ; SimonSimTour
1995 « courant dans les campagnes tourangelles du sud » ; BlanWalHBret 1999 « on précise souvent dalle nantaise » ; MoreuxRToulouse 2000 « régionalisme inconscient » ; FEW 15/2, 49b, dæla.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (II) Charente, Charente-Maritime, Gers, Landes, Hautes-Pyrénées, Deux-Sèvres, Vienne,
100 % ; Gironde, 90 % ; Vendée, 75 % ; Pyrénées-Atlantiques, 50 % ; Indre-et-Loire,
40 % ; Lot-et-Garonne, 40 %.
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