tiot, tiote adj. et n.
〈Nord, Pas-de-Calais, Somme, Aisne, Oise〉 fam.
1. Souvent à valeur hypocoristique "de faibles dimensions ; modeste, simple". Synon. région. chetit*.
1. Elle avait apprêté les jattes* à café, et la grande cafetière attendait au bout du poêle. On but la tasse traditionnelle,
car chez nous, tout accueil, toute rencontre commence par une « tiote tasse ». (A. Lebon, Martin du Tiss, mineur en 1900, 1979, 180.)
— Dans des enseignes d’estaminets ou de restaurants. Le T’chiot Zinc (à Amiens).
2. "enfant (garçon ou fille)". Stand. fam. gamin, gamine. Synon. région. chétit*, drôle*, gone*, minot*, petit*, pitchoun*.
— [Envisagé dans un rapport de filiation]
2. « Tu sais, disaient-ils en se poussant du coude, c’est l’ tiot Thorez ! Il a grandi… » (M. Thorez, Fils du peuple, 1960, légende de photographie, encart entre pp. 32 et 33.)
● Comme terme d’adresse. Au lit, les tiots ! (A. Lebon, Martin du Tiss, mineur en 1900, 1979, 74).
3. Alors, mon père disait :
– […] Allez… Allez… du courage. Tenez, mes « tiotes », je vais vous chanter quelque chose. (S. Grafteaux, Mémé Santerre, 1988 [1975], 20.) — [Envisagé par rapport à l’âge ou à valeur hypocoristique]
4. Quelques gars qui s’étaient présentés au travail avaient eu leurs vitres brisées ;
femmes et même enfants avaient subi des représailles [lors des grèves de 1948 dans
les mines du Pas-de-Calais]. Un tiot de six ans était revenu de l’école sans culotte sous les quolibets […]. (A. Viseux,
Mineur de fond, 1991, 399.)
■ remarques. S’il n’est pas une réécriture, l’exemple suivant témoigne d’une tentative d’alignement
du locuteur sur le fr. standard : « Même les p’tiots de notre cité, ils commencent à faire des conneries » (Témoin du Nord, dans P. Bourdieu, La Misère du monde, 1993, 98.)
● Comme terme d’adresse.
5. – Coute [= écoute], tiote, j’ai un mot à te dire. […] Dis donc, tiote, tu ne serais pas communiste, quelquefois [= peut-être, par hasard] ? (A. Stil, André et Violine, 1994 [1964], 311.)
● Dans des enseignes d’estaminets ou de restaurants.
6. Nous descendions toute la rue, nous passions devant Chez Tiot Louis, le cabaret des mineurs, que je considérais avec un mélange de méfiance et de respect :
c’était le domaine exclusif des hommes, je n’y étais jamais entrée. (M.-P. Armand,
La Poussière des corons, 1997 [1985], 14.)
■ pronon. Souvent palatalisé [tjo] > [tʃ(j)o] : Tchiot Zinc (v. ci-dessus) et CartonPoulet 1991 tcho.
◆◆ commentaire. Caractéristique des dialectes et du français du nord de la France, tiot (aphérèse de fr. petiot, de même sens) est attesté dep. 1841 à Douai (FEW) et déjà comme surnom au 19e s., « Louis l’tiot [au sens de fils] », à Haveluy (Nord)a (à paraître dans Patrom) ; « dans la région de Lille et dans le Boulonnais, il est senti comme venant d’ailleurs
(de l’Artois et de la Somme) », comm. de F. Carton. Il est ignoré de la lexicographie générale. On notera que la
forme aphérésée du simple petit est attestée notamment dans les parlers de l’Artois (FEW 8, 342b et ALF 623 pt 297) et en français dans un texte imprimé ca 1850, mais remontant probablement à la fin du 18e siècle et reposant sans doute sur une version du 16e, texte qu’on a proposé de localiser dans la région de Lille (Chambon MélBurger 166-167
et 169-170) ; cf. le nom propre Tit, relevé dans le Nord, l’Eure et la Seine-Maritime (dans Patrom, à paraître).
a À paraître dans Patrom, comm. d’Eva Buchi.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Aisne, Nord, Oise, Pas-de-Calais, 100 % ; Somme, 65 %.
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