bougnette n. f.
I. 〈Gard, Lozère, Pyrénées-Orientales〉 usuel Le plus souvent au pl. "beignet de pâte très fine et étirée, cuit dans l’huile bouillante puis saupoudré de
sucre fin, traditionnel de la Chandeleur et du Mardi-gras ou des repas de fête d’hiver". Synon. région. bugne*, ganse*, guenille*, merveille*, oreillette*.
1. Une fois, un des plus riches du village a marié sa fille, et au lieu de nous inviter
au réveillon, il s’est contenté de nous offrir des « bougnettes ». (Marius Roussillon, dans L. Chaleil, La Mémoire du village, 1989 [1977], 57.)
II. 〈Hérault (région de La Salvetat), Aude, Tarn, Ariège〉 usuel "boulette de viande de porc hachée, mêlée d’œuf et de mie de pain, présentée dans une
crépinette". Synon. région. caillette*, fricandeau*. – La bougnette, charcuterie typique de Saint-Pons[-de-Thomières, Hérault] (Midi libre, 12 décembre 1999, 37).
2. Concours « La Bougnette d’or » / […] il suffit […] de fournir 10 bougnettes de votre fabrication avant le jeudi 22 février. […] Le goût, l’aspect, l’originalité
seront parmi les critères que noteront les membres du jury. À vos casseroles ! (La Gazette du cochon, n° 3, 1996, Saint-Pons, Hérault, n.p.)
— Au sing. à valeur générique.
3. La bougnette est surtout fabriquée dans les montagnes de l’Hérault (La Salvetat-sur-Ahout) et
de l’Aude par de nombreux charcutiers locaux. On la rencontre aussi dans le Tarn et
dans l’Ariège. […] La bougnette se consomme froide en entrée, chaude en tranches grillées à la poêle, ou encore sèche
accompagnée d’une salade frisée. Une confrérie et une foire annuelle en octobre lui
sont dédiées, à Saint-Pons-de-Thomières [Hérault]. (L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Languedoc-Roussillon, 1998, 159-160.)
■ encyclopédie. Recette de « Bougnette languedocienne » dans A. Bonnaure, La Cuisine rustique. Languedoc, 1971, 49. V. encore L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Midi-Pyrénées, 1996, 108-109 ; id. Languedoc-Roussillon, 1998, 159-160.
III. 〈Isère (Vienne), Provence, Gard, Hérault, Aude, Lozère, Ardèche〉 fam. "surface (d’un vêtement) qu’on salit par inattention en mangeant". Stand. tache. – Se faire des bougnettes (BouvierMars 1986 ; ArmanetBRhône 1993 ; CovèsSète 1995).
4. – […] Quand on travaille, on n’a pas le temps de se pomponner…
Une pierre dans mon jardin : mon chignon tient bien, mon cardigan est sans bougnettes. (A. Sarrazin, La Cavale, 1965, 221.) 5. Si papa était l’élégance même, Marcel [Pagnol] affichait un certain laisser-aller
vestimentaire et je l’ai rarement vu en complet-veston. Il préférait les pantalons
en velours côtelé et les pull-overs souvent décorés de « bougnettes » (taches) que papa lui reprochait sévèrement. Seule, Josette Day avait réussi à l’habiller
chez Lanvin et lorsque ainsi paré, il se présentait à papa, celui-ci ne manquait jamais
de remarquer : « Boudiou*, que tu es beau Marcel, mais fais-toi vite une bougnette, tu seras plus à l’aise. » (P. Brun, Raimu mon père, 1980, 84.)
◆◆ commentaire.
I. Emprunt au lang. bougneto "beignet" (Sauvages 1756), relevé dans le français de Nîmes dep. 1924 « bougnette […] vendue par un faiseur de chichis […] sur la place du Théâtre » (Joblot).
II. Emprunt au lang. bougneto (« Dans les montagnes de Lacaune, on fabrique des bougnetos avec de la viande de porc hachée menue, de la mie de pain, du lait et des œufs pétris
ensemble » A. Vidal, dans RLR 42 (1899), 217), celui-ci peut-être à mettre en rapport avec bonhieta (attesté en 1391 à Gaillac "espèce de mets"), et documenté en français dep. 1933 (« Bougnettes d’Albi froides (grosses crépinettes de porc). Bougnettes de porc de Cabardès,
de Caxac, de La Galaube » Curnonsky et A. de Croze, Le Trésor gastronomique de France, 238) ;
III. Emprunt au lang. bougneto "tache d’huile, de graisse, de cambouis" (Sauvages 1756, par analogie de I), relevé dans le français de Nîmes dep. 1924 (« bougnette s.f. Tâche [sic] grasse qui vient s’appliquer sur le devant du vêtement à la manière d’une décoration » Joblot) ; malgré ColinArgot 1990 (qui cite A. Sarrazin), le mot n’est pas passé en
argot et encore moins en argot général.
◇◇ bibliographie. (I) JoblotNîmes 1924 ; TuaillonRézRégion 1983 ; CampsLanguedOr 1991 ; CampsRoussillon
1991 ; PolverelLozère 1994 ; aj. à FEW 1, 629a, *bunia. – (II) Aj. à FEW, loc. cit. – (III) JoblotNîmes 1924 ; RLiR 42 (1978), 162 bugnette, bougnette (Ardèche [Privas], Provence) ; MédélicePrivas 1981 ; BouvierMars 1986 ; ArmanetVienne
1989 ; CampsLanguedOr 1991 ; LangloisSète 1991 ; CouCévennes 1992 s.v. bougne ; ArmanetBRhône 1993 ; FauconHérault 1994 ; PolverelLozère 1994 ; CovèsSète 1995 ;
MazodierAlès 1996 ; ArmKasMars 1998 ; RoubaudMars 1998, 62 ; BouisMars 1999 ; aj.
à FEW, loc. cit.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (I) Pyrénées-Orientales, 100 %. (II) Ø. (III) Bouches-du-Rhône, Var, Vaucluse, 80 % ; Alpes-de-Haute-Provence, 50 % ; Alpes-Maritimes,
35 % ; Hautes-Alpes, 0 %.
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