bazarette n. f.
〈Hautes-Alpes, Provence, Ardèche〉 fam. "personne bavarde ; personne qui colporte des racontars". Stand. commère, fam. pipelette. Synon. région. barjaque*, bartavelle*. – Un troupeau de bazarettes qui commentent ce qu'elles auraient aimé voir (R. Frégni, Le Voleur d'innocence, 1996 [1994], 139). J'ai plein de choses à dire, une vraie bazarette (G. Del Pappas, Massilia dreams, 2000, 56).
1. – Ô Delphine, grande bazarette, c'est pas bien joli de faire des coquetteries à ce vieux diable […] ! (M. Pagnol,
Manon des sources, 1995 [1963], 1077.)
2. – […] Allez, Pascal, viens un peu me raconter l'école, qu'est-ce que tu apprends de
beau ?
Souvent elle posait la question, d'ordinaire Gaston intervenait. – Laisse respirer le petit, Mireille, c'est pas une bazarette comme toi. (P. Cauvin, Rue des Bons-Enfants, 1990, 15.) 3. À toute heure du jour, pour une livre de farine ou une bouteille de vin, les femmes
se précipitaient chez monsieur Makarian. Ça sentait le cumin, l'estragon, l'ail, la
cannelle, le safran, l'anis et le fenouil. Elles étaient toutes là, les pipelettes,
celles qui arrivaient ou qui repartaient, les sacs remplis, parce que plus on achète
plus on reste, et plus on reste plus on barjaque*. / […] Kamel et moi, on leur arrive à peine aux genoux, aux bazarettes, personne ne fait attention à ce qu'on fabrique. On chipe des bonbons aux étagères
du bas, on chaparde dans les paniers ou dans les cageots. (M. Albertini, Les Merdicoles, 1998, 104 et 108.)
V. encore s.v. bartavelle, ex. 1 ; languir, ex. 6.
— Emploi adj.
4. – La femme du notaire, elle est tellement bazarette qu'elle irait le dire à tout le monde. (Téléfilm Le Secret de Batistin, FR 3, 9 juillet 1980, dans Doillon, octobre 1983.)
— Comme titre de périodique.
5. Dans la foulée […], M. Sonot et sa petite équipe […] ont créé trois autres journaux
de quartier dans les grandes cités des treizième et quatorzième arrondissements de
Marseille : l'Eveil-Malpassé, intitulé la Bazarette […]. (Le Monde, 4 juillet 1994, 5.)
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
6. On dit que le Marseillais est très bavard, je crois qu'il ne faut pas en faire une
généralité, il préfère distiller un mot à l'emporte-pièce, que faire de longs discours,
il a du reste un mot pour qualifier ceux qui parlent trop, il les traite de « bazarettes ». (A. Detaille, Les Noyaux de cerises, 1978, 58.)
7. […] « bazarette » comme on dit chez nous, tandis qu'à Paris on dit « pipelette ». (P. Brun, Raimu mon père, 1980, 37.)
— 〈Provence〉 faire la bazarette/les bazarettes loc. verb. "parler de choses et d'autres". Stand. bavarder, fam. faire la causette, papoter. Synon. région. barjaquer*, bartaveler*, bazaretter.
8. Honorine se pencha vers moi et parla sur le ton de la confidence :
– La pauvre, vé*, elle a pas l'air dans son assiette. Je mettrais ma main au feu qu'elle a des ennuis. […] Elle m'a fait la bise, et des sourires. On a un peu fait la bazarette en buvant le café. Mais j'ai bien vu que dessous tout ça, elle a une pauvre figure de jours sans pain. (J.-Cl. Izzo, Chourmo, 1996, 32.) 9. – C'est pourquoi ?
– Bonjour madame, dis-je en m'approchant de la fenêtre. Je venais voir monsieur Hamoudi. Je suis son petit-fils. Mais il ne répond pas. – Ça m'étonne. Qu'[v. que] à midi, on a encore fait les bazarettes, dans le jardin. Et après, il se fait toujours la petite sieste. Alors, ma foi, y doit être là. (J.-Cl. Izzo, Chourmo, 1996, 165.) ■ dérivés. 〈Provence, Ardèche〉 bazaretter v. intr. fam. « parler de choses et d'autres ». Stand. fam. papoter. Synon. région. barjaquer*, bartaveler*, faire la/les bazarette(s). « J'en avais assez. Entendre bazaretter ces deux femmes à côté du cadavre […], non, j'en pouvais plus ! » (Th. Monnier, Madame Roman, 1998 [1957], 133) ; « Que font-elles, elles parlent pendant des heures, et vous regardent passer ; non,
elles ne discutent pas, on dit chez nous qu'elles “bazarettent” » (A. Sportiello, Les Pêcheurs du Vieux-Port, 1981, 301) ; « […] ma mère prenait le frais devant la porte […] en bazarettant comme d'habitude avec des voisines […] » (R. Bouvier, Tresse d'aïet, ma mère, 1997 [av. 1992], 38). – MédélicePrivas 1981 ; ArmKasMars 1998 ; aj. à FEW 19, 33b, bazahr.
◆◆ commentaire. Attesté dep. 1931 dans le français de Marseille (« bazarette, femme bavarde, commère » Brun), le terme est en ce sens caractéristique de cette ville, d'où il a essaimé
dans une aire compacte du Sud-Est ; il est emprunté au pr. bazaruetto "terme de mépris, que l'on applique aux femmes qui veulent se mêler de toutes les affaires,
à celles qui font de faux rapports, &c." (AchardMars 1785), lui-même dérivé, avec glissement métaphorique, sur pr. bazar "achat ou échange de marchandises" (ibid.).
◇◇ bibliographie. BrunMars 1931 ; RLiR 42 (1978), 159 ; MédélicePrivas 1981 « peu fréquent. Il est connu de tous mais ressenti comme un argot venant du Sud » ; BouvierMars 1986 ; MartelProv 1988 ; ArmanetBRhône 1993 ; GermiChampsaur 1996 bazarète, barzète ; ArmKasMars 1998 ; RoubaudMars 1998, 83 ; BouisMars 1999 basarette ; FEW 19, 33b, bazahr.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Vaucluse, 80 % ; Var, 65 % ; Bouches-du-Rhône, 60 % ; Hautes-Alpes,
50 % ; Alpes-de-Haute-Provence, 30 % ; Alpes-Maritimes, 25 %.
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