aillade [ajad] n. f.
1. 〈Ariège, Haute-Garonne, Tarn, Tarn-et-Garonne, Lot, Aveyron〉 "soupe à base de gousses d’ail bouillies". Synon. région. eau bouillie*, tourin*.
1. […] le tourril* et l’aillade font partie de la nostalgie. (Y. Rouquette, « Histoires de parler », dans Toulouse, 1991, 143.)
2. […] la tapenade* quasi violette […] et l’aillade où la mie de pain faisait comme du gras… (J.-B. Pouy, Palmiers et crocodiles, 1994, 95.)
— En part. "soupe fortement épicée, traditionnellement apportée aux jeunes mariés pendant la nuit
de noces". Stand. soupe à l’oignon. Synon. région. rôtie*, tourin* de noces.
3. La cérémonie de « l’Aillade » achevait le rite des épousailles. Cette soupe, noire de poivre, était présentée par
les jeunes gens de la noce aux nouveaux époux déjà couchés. (A. Bonnaure, La Cuisine rustique. Languedoc, 1971, 96.)
□ Avec un commentaire métalinguistique incident.
4. On confond souvent – même en Ariège – l’ouillade (ainsi nommée parce qu’elle se fait dans l’ouille, marmite en terre vernissée) et l’aillade, nom générique des soupes à l’ail du Moyen Age, que l’on servait aux jeunes mariés
et que l’on sert encore, quelquefois, dans un pot de chambre neuf. (Chr. Bernadac,
La Cuisine du comté de Foix et du Couserans, 1982, 54.)
2. 〈Hérault (Causse-de-la-Selle)〉 "soupe à base de poissons d’eau douce coupés en tronçons et cuits dans un bouillon
parfumé à l’ail, à la tomate, aux oignons et au serpolet".
5. […] L’apéritif coule à flots, glacé, dans les gosiers – anis de contrebande et carthagène*. On hume les senteurs du bouillon, où l’on vient déposer le poisson coupé en tronçons.
[…] / Quand le moment est venu, on fait la queue avec son assiette et on vous octroie
une large part d’aillade. Chaque famille, chaque groupe a sa manière de pomper la sauce : qui du riz, qui des
patates, qui simplement du pain. (M. Rouanet, Petit Traité romanesque de cuisine, 1997 [1990], 172.)
— Par méton. "repas dont le plat principal est cette préparation".
6. La spectaculaire aillade du Causse-de-la-Selle […] / Le jour de la fête locale qui se situe le dimanche avant
le 14 juillet, une tradition surprenante réunit tous les habitants en un pique-nique
géant : l’« aillade ». (M. Rouanet, Petit Traité romanesque de cuisine, 1997 [1990], 171.)
◆◆ commentaire. Aocc. ailhada (dep. 1392, à Gaillac, « salsa de alhiada », RLR 42, 217)a a été emprunté en français général dep. 1532 (Rabelais, FEW ; Huguet ; GebhardtOkzLehngut
1974, 302) ; il y a évincé le type autochtone aillée dont la dernière attestation dans la langue écrite date de 1606 (FEW ; Huguet ; textes
du Val de Loire, cf. Chambon/Chauveau, MélVarFr III, 43) et qui semble depuis cette
date régionalisé dans l’Ouest (poit. [1734], Ré, saint. SeudreS, loch. dans FEW ;
Charente [GlossSefco] et Touraine [région.] dans TLF), ceci dans diverses acceptions.
Plus récemment, le même type a pénétré en français de référence dans le sens de "tranche de pain (grillée) fortement frottée d’ail" (dep. Boiste 1812, FEW), mais les sens analysés ci-dessus, nouveaux emprunts à l’occitan,
caractéristiques du Languedoc, sont restés régionaux et sont absents des dictionnaires
généraux contemporains. 1 est attesté dep. 1802 dans le français de Montpellier (« Eau-bouillie ou Aillade, Potage à l’ail, ou potage à l’eau » Villa) ; 2, qui paraît local, dep. 1990 (v. ici ex.5).
a La date donnée dans TLF (= ca 1350, FEW) correspond à un autre texte, où le sens est différent (= "ail", "groupe de têtes d’ail").
◇◇ bibliographie. VillaGasc 1802 (sens 1) ; ChambonVayssier 1879 (sens 1) ; GebhardtOkzLehngut 1974 ;
BoisgontierMidiPyr 1992 (sens 1) ; FEW 24, 334b, allium.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (1) pour l’ensemble des départements cités : 70 %.
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