pâté n. m.
I. [Préparation salée]
1. 〈Cher (sud), Allier, Puy-de-Dôme, Creuse, Corrèze〉 pâté aux/de pommes de terre loc. nom. m. usuel "tourte aux pommes de terre". Il aimait les bords de l’Allier, Pourrat et les chroniques de Vialatte […], le pâté
aux pommes de terre et le vin de Saint-Pourçain (Le Monde, 8 juillet 2000, 29).
1. Un pâté aux pommes de terre d’une dimension de roue de charrette fut déposé au centre de la table. (R. Fallet,
Les Vieux de la vieille, 1996 [1958], 198.)
2. C’est Robert qui cuisine – il prépare les civets, les rôtis, les gâteaux, les plats
régionaux comme le pâté de pommes de terre, la grillée de porc ou la sanguette*… (« Journal d’un paysan de Creuse [A. Michard, Saint-Médard-La-Rochette] », présenté par T. Jolas et S. Pinton, Terrain. Carnets du patrimoine ethnologique 28, 1997, 158.)
3. […] il s’est acheté une part de pâté aux pommes de terre, une spécialité locale [de Montluçon] à la crème[,] qui vous étouffe recta son chrétien.
(A. Aucouturier, L’Arthritique de la raison dure, 1999, 88.)
4. Le pâté aux pommes de terre creusois. […] Quelques-uns rajoutent du lard ou de la chair à saucisse, ce qui est
pour la tradition régionale une scandaleuse hérésie. (Le Monde, Supplément, 13 juillet 2000, X.)
■ encyclopédie. Recette de « Pâté de pommes de terre » dans L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Limousin, 1998, 186. V. encore GagnonBourbonn 1979, 103-104.
2. 〈Ain, Loire (Pilat, Rive-de-Gier), Drôme, Ardèche (Annonay), Haute-Loire (Velay)〉 pâté chaud loc. nom. m. "entrée faite d’une timbale de pâte feuilletée garni d’une préparation de viande en
sauce (tomate ou béchamel), avec champignons et/ou quenelles". Stand. vol-au-vent.
5. Bonne renommée depuis des lustres [un restaurant de Priay, Ain]. Georges Berger, dans
la confortable atmosphère de son auberge, vous fera goûter ses heureuses spécialités
(pâtés chauds, gratin de queues d’écrevisses, poulet de Bresse aux morilles) mais pas données, hélas !
(R. J. Courtine, Guide de la France gourmande 1981, 1980, 212.)
— 〈Ain (Belley)〉 petit pâté (chaud) "petit chausson farci à la viande (veau et porc)".
6. Bien qu’ils ressemblent à tous les petits pâtés fabriqués dans les bonnes maisons au siècle dernier, au fur et à mesure qu’ils disparaissaient,
leur présence se perpétuait dans la patrie de Brillat-Savarin […]. Traditionnellement,
ces petits pâtés se consommaient chauds la nuit de Noël, en guise de collation au retour de la messe
de minuit. C’est aussi une entrée appréciée des repas de fête. (L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Rhône-Alpes, 1995, 199-200.)
3. 〈Charente, Charente-Maritime, Deux-Sèvres, Vienne, Haute-Vienne (nord)〉 pâté de Pâques loc. nom. m. "tourte à la viande (de porc, de volaille ou de lapin) et aux œufs durs, confectionnée
traditionnellement à l’époque de Pâques". Synon. région. tourtière*.
7. Si vous nous faites visite au temps pascal, vous dégusterez le Pâté de Pâques, en croûte et garni d’œufs durs au centre du hachis. (L. Lelong, Deux-Sèvres et Marais poitevin, 1968, 67.)
8. Qui ne connaît pas le bon pâté de Pâques dans la région de Saint-Martin-l’Ars, Le Vigeant, L’Isle-Jourdain ? Chaque maîtresse
en a la recette et sait disposer les œufs durs et les boules de pâté dans la pâte.
(Aguiaine 11, 1976, 377.)
■ encyclopédie. Recettes de « Pâté de Pâques » dans J. Philippe-Levatois, Cuisine traditionnelle de Poitou et de Vendée, 1976, 167-168 ; J.-E. Progneaux, Recettes gastronomiques de Vendée et du Marais poitevin, 1977, 70 ; L’Encyclopédie de la cuisine régionale. La Cuisine Vendée, Poitou, Charentes, 1980, 22-23. V. encore L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Poitou-Charentes, 1994, 143-144.
4. 〈Surtout Nord, Pas-de-Calais, Allier, Aude, Lot, Puy-de-Dôme, Haute-Vienne (nord)〉 pâté de tête loc. nom. m. "préparation de charcuterie à base de morceaux de tête de porc pris en gelée dans un
moule". Stand. fromage de tête. Synon. région. gelée*, presskopf*. – Terrine de pâté de tête (Restaurant lillois, dans Le Monde, 1er novembre 1995, 21).
9. Dans le cochon, rien ne se perdait, depuis les pieds jusqu’au museau, tout était bon.
[…] Les couennes allaient au sel, les oreilles et le museau au pâté de tête, les restes nous donneraient des andouilles. (P. Gougaud, L’Œil de la source, 1978, 156.)
10. « Je mets à cuire une demi-tête de cochon avec des légumes. Le lendemain, ça me fait
un pâté de tête, naturel. » (Habitant de Tourcoing, dans Le Monde, 25 septembre 1996, 14.)
11. C’était le plus souvent mon grand-père qui achevait le travail [de la fenaison], tandis
qu’à l’ombre de la haie nous aidions ma grand-mère à mettre la table sur une vieille
couverture que je ne vis jamais employée qu’à cet usage. […] Salade de tomates, pâté de tête, poulet froid, fromage, limonade : c’était le festin de l’année. (Chr. Signol, Bonheurs d’enfance, 1998 [1996], 87.)
V. encore s.v. presskopf, ex. 6-7 et Rem..
II. [Préparation sucrée]
1. 〈Sarthe, Loire-Atlantique (est), Maine-et-Loire, Vendée, Deux-Sèvres, Charente-Maritime,
Charente, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher (nord-est), Allier, Rhône, Loire, Haute-Loire,
Cantal (nord-est), Puy-de-Dôme (rural et vieilli), Corrèze〉 "tarte aux fruits à double abaisse de pâte, souvent feuilletée". Stand. tourte. Synon. région. pastis* (sens 3), pompe* (sens 3). – Je fais beaucoup de pâtés, surtout avec des poires ou des pommes (MartinPilat 1989).
12. – […] Je chauffe le four demain, et je ferai des pâtés. Tu lui diras de m’apporter des pommes. (A. Bardin, Angélina, une fille des champs, 1958, 37.)
13. À la saison des fruits, ma mère en profitait pour faire deux ou trois gros « chaussons » ou « pâtés ». C’était une pâte à tarte, assez grossière, avec la même farine que pour le pain,
et puis de la graisse de cochon ou du beurre. On mettait une grosse épaisseur de poires
ou de cerises entre deux couches de pâte et on cuisait en même temps que le pain.
Ces pâtés avaient en moyenne quarante centimètres de longueur sur vingt ou vingt-cinq de largeur.
(Cl. et J. Jeury, Le Crêt de Fonbelle, 1981, 95.)
14. Quant à ma mère, elle était renommée pour ses pâtés. Entendez les chaussons aux pommes. (G. Chevereau, Une enfance à la campagne, 1987, 103.)
15. Dans le meilleur des cas, c’est-à-dire lorsqu’on avait cuit le pain la veille ou le
jour même venait s’y ajouter une tarte à la crème ou aux pruneaux que l’on appelait
« un pâté »… (G. Marthon-Marchi, La Terre à ses sabots, 1994, 49.)
16. On trouve encore fréquemment des pâtés dans les Monts du Lyonnais […]. (L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Rhône-Alpes, 1995, 136-137.)
17. Pour ces soirées la Louise présentait souvent un énorme pâté aux poires rousselettes. Une fois coupé, ce pâté laissait couler d’entre ses fruits une nappe de crème, rosée, du plus bel effet et
qui garnissait votre assiette d’un dessert savoureux. Les ch’tits* se suçaient les doigts […]. (S. Lavisse-Serre, Les Locatiers de Beauvoir, 1998, 66.)
— Suivi d’un compl. déterm. précisant la nature des fruits employés. Le pâté de prunes qu’affectionne le grand-oncle (H. Bazin, Vipère au poing, 1948, 235). Un pâté aux poires (M. Exbrayat, Maria de Queyrières, 1990, t. 1, 205). Des pâtés aux poires, des pompes* aux pommes (P. Fournier, « Souvenirs sur Saint-Arcons-d’Allier [Haute-Loire] », Bïzà Neirà 85, 1995, 40).
18. La table était servie ; […] il y avait également beaucoup de légumes et je me rabattis
dessus, puis des magnifiques pâtés aux pommes, cuits au four à pain. Ils étaient si bons qu’ils devaient contenir autant de beurre
que de farine. C’était du pâté qui avait dû pisser le beurre sur la margelle du four
pendant sa cuisson. (A. Bardin, Angélina, une fille des champs, 1958, 128.)
19. Le pâté aux prunes […]. Faire une pâte à chausson avec la farine, le beurre, l’œuf, le sel et un peu
d’eau. Enfermer les prunes coupées en deux et sans noyaux dans cette pâte dont le
dessous doit être plus épais que le dessus. (Y. Meynier et J. de Roincé, La Cuisine rustique. Bretagne, Maine, Anjou, 1970, 191.)
20. Pâté aux prunes. […] En Touraine, ce pâté se fait avec une pâte feuilletée. On peut également le faire
avec d’autres variétés de prunes […] moins juteuses que les reines-claudes […] : on
les entassera au maximum avant de sucrer abondamment. (L’Encyclopédie de la cuisine régionale. La cuisine des Pays de Loire, 1980, 138.)
21. Au dessert, après le pâté aux pommes, Valentine supplia le chef de chanter une chanson corse. (J. Anglade, Un lit d’aubépine, 1997 [1995], 23.)
V. encore ici ex. 17 et 22.
□ Dans un énoncé définitoire ordinaire.
22. Le pâté, en Forez, est le chausson aux pommes, poires ou à la crème. Pour la vogue* (= la fête patronale), le boulanger fait des “pâtés” très épais en pâte. (M. Gonon, Vox 40, 1981, 121, n. 8.)
□ Avec ou dans un commentaire métalinguistique incident.
23. Les prunes, Reine-claude, qu’on appelle ici abricots, étaient réservées chaque année
par les boulangers pour garnir les énormes chaussons qu’on nomme pâtés. C’était sa fierté de voir sa récolte ainsi transformée à la vitrine de tel boulanger de la rue Nationale, un jour
de comice. (L. Lebourdais, Les Choses qui se donnent…, 1995, 42.)
V. encore s.v. pompe, ex. 7.
■ encyclopédie. Sur le « pâté de prunes (d’Angers) », v. L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Pays-de-la-Loire, 1993, 126-128 et 330 ; id. Rhône-Alpes, 1995, 136-138. Recettes du « Pâté aux poires » dans GagnonBourbonn 1979, 104.
2. 〈Isère (Meyrieu-les-Étangs et St-Jean-de-Bournay)〉 "chausson à la confiture". Quand je vais au marché le lundi, j’achète un pâté, les petits y* aiment bien (MartinPellMeyrieu 1987).
◆◆ commentaire. Fr. pâté "pâtisserie qui renferme des viandes ou du poisson" (ca 1170 pasté Chrétien de Troyes, v. TLF) n’est plus dans l’usage actuel du français de France
(« vx » dans GLLF, Rob 1985 et TLF), mais survit dans quelques lexies absentes des dictionnaires
généraux contemporains et de FEW 7, 745a, pasta : pâté aux/de pommes de terre et pâté de Pâques, bien limitées géographiquement, et pâté de tête dont les aires d’emploi sont difficiles à déterminer en l’absence d’une enquête systématique
– cf. aussi les emplois québécois (DHFQ 1998) et acadien (NaudMadeleine 1999). Pour
désigner une pâtisserie sucrée, le mot n’est pas documenté en France dans les recueils
différentiels avant 1894 (Puitspelu), mais l’aire de dispersion de ce sens le désigne
comme un archaïsme : usuel en Belgique au sens de "petit gâteau fin, notamment à la crème" (MassionBelg 1987 ; LeboucBelg 1998 ; DelcourtBelg 1999 ; TLF « région. (Belgique) »), il est « région. » au Québec (DHFQ 1998).
I.1. BrunetFranchesse 1937 ; BrunetFrBourbonn 1964 ; fr. québécois pâté aux patates (DHFQ 1998). 2. Attesté dep. 1931 (Guide Una de l’automobiliste. La France, 5e éd., d’après L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Rhône-Alpes, 1995, 200), cet emploi est mal dégagé dans les dictionnaires généraux et absent de
FEW 7, 750b, *pasticius. – MartinPilat 1989 pâté-chaud « usuel à partir de 40 ans » ; FréchetMartVelay 1993 pâté-chaud « globalement connu » ; FréchetAnnonay 1995 pâté-chaud « globalement connu » ; FréchetDrôme 1998 « peu attesté ». 3. Attesté dep. 1928 (« La tourtière ou pâté de Pâques », A. Croze, Les Plats régionaux de France, 172) ; RézeauOuest 1984 et 1990. 4. LaMazillePérigord 1929, 173-174 pâté de tête de porc ; BonnaudAuv 1980 pâté de tête de porc ; CartonPouletNord 1991.
II.1. PuitspeluLyonSuppl 1897 pâté de vogue ; VerrOnillAnjou 1908 ; DauzatVinz 1915, § 964, pâté aux pommes (définissant) et § 3258 pâté de viande (id.), 4904 ; BrunetFranchesse 1937 pâté aux poires ; MussetAunSaint 1938 ; ParizotJarez [1930-40] ; BrunetFrBourbonn 1964 pâté aux poires ; BonnaudAuv 1980 ; MartinPilat 1989 « usuel » ; DHFQ 1998 pâté aux pommes (bleuets, framboises, fraises) "tarte (à deux abaisses)…", dep. 1878 ; MichelRoanne 1998 « usuel » ; BlanWalHBret 1999 ; ChambonÉtudes 1999, 25 ; ALIFOms pt 68 « Les pâtés aux pommes sont la spécialité de Saint-Gourgon [Loir-et-Cher], village voisin ». 2. Attesté dep. 1937 dans le français de Lyon (Miège). – MiègeLyon 1937 ; MartinPellMeyrieu
1987 « spécialité des boulangers et pâtissiers de Saint-Jean-de-Bournay » ; VurpasLyonnais 1993 « bien connu » ; SalmonLyon 1995 ; HöflerRézArtCulin ; ChambonÉtudes 1999, 25, 61 ; FEW 7, 745a, pasta.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : (I.1) Ø. (I.2) Ø (I.3) Vienne, 80 % ; Charente, 50 % ; Charente-Maritime, Deux-Sèvres, 25 %. (II.1) Deux-Sèvres, 100 % ; Maine-et-Loire, 65 % ; Vendée, 50 % ; Sarthe, 30 % ; Charente,
Charente-Maritime, 25 % ; Vienne, 20 % ; Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, 0 %. (II.2) Ø.
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