gâteau n. m.
I. [Préparation sucrée]
1. 〈Ariège, Haute-Garonne, Aveyron, Cantal (sud), Gers〉 gâteau à la broche loc. nom. m. "pâtisserie faite d’un appareil à biscuit diversement parfumé que l’on fait cuire,
couche par couche, jusqu’à épuisement de la pâte, sur une broche tournante dotée d’un
cône massif entouré de papier sulfurisé huilé". Le gâteau à la broche de Saint-Mamet [Cantal] n’est, hélas, plus qu’un souvenir (A. Pourrat, Traditions d’Auvergne, 1976, 111).
1. […] le gâteau à la broche. / […] On dépose la pâte sur un cône de bois enfilé sur une broche, presque goutte
à goutte pour que chaque couche cuise avant qu’on ne verse la suivante. (A. Merlin,
A.-Y. Beaujour, Les Mangeurs de Rouergue, 1978, 70.)
2. Le spectaculaire gâteau à la broche n’a pu être retenu non plus [dans une émission télévisée], en raison de la complexité
de sa fabrication. (« Échos et nouvelles », Revue du Rouergue 34, 1980, 190.)
3. Devant la cheminée, une aïeule tournait le gâteau à la broche. […] De sa main gauche, elle tournait la broche, un long cône de fer monté sur un
axe qu’on actionne par une manivelle. De sa main droite, elle prenait la crème dans
une jatte avec une longue cuillère de bois et la versait avec une infinie lenteur,
avec d’extrêmes précautions sur le cône qui virait prudemment devant le feu. Et la
crème se prend et se dore aussitôt mais attention, il ne faut pas qu’elle se brûle,
il ne faut pas aller trop vite. Depuis deux grandes heures, cette vieille femme était
accroupie devant un monceau de braises et sa tâche était loin d’être achevée. Il faudrait
deux heures encore, et peut-être davantage pour que, le gâteau redressé, le cône élevé,
elle présentât l’œuvre accomplie. C’est un art de patience, de minutie, de finesse.
(P. Gamarra, Le Fleuve palimpseste, 1984, 163-164.)
4. À Naucelle [Aveyron] on avait mangé […] charcuterie, tripous*, rôti, salade, fromage, gateau [sic] à la broche… (Y. Rouquette, La Mallette, 1994, 38.)
5. Autrefois, dans les Pyrénées, pas un repas de mariage ne s’achevait sans un Gâteau à la broche – impressionnante pyramide hérissée de pics en pâte dorée qui pouvait atteindre un
mètre de haut, peser jusqu’à trois kilos et demi et qui nécessitait de longues heures
de cuisson. […] Consommé à l’occasion des mariages et des célébrations familiales,
le Gâteau à la broche, qui évoque par sa forme une Pièce montée classique, est encore très apprécié de nos
jours. (N. Barbier et E. Perret, Petit Traité d’ethno-pâtisserie, 1997, 171.)
6. C’était un soir de baptême, bien arrosé. Le madiran [= vin produit à Madiran, Hautes-Pyrénées]
aidant, et le gâteau à la broche réduit en miettes, la discussion avait tourné à l’orage. (Fr. Pons, Les Troupeaux du diable, 1999, 53.)
V. encore s.v. tourte, ex. 23.
■ encyclopédie. V. L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Midi-Pyrénées, 1996, 88 ; id. Aquitaine, 1997, 94.
2. 〈Franche-Comté〉 spor.
2.1. 〈Doubs〉 gâteau de ménage loc. nom. m. "pâtisserie faite d’une abaisse de pâte levée garnie de goumeau* ou parfois de gros sucre". Synon. peu usuel galette au/de goumeau*, peu usuel goumeau*, toutché*. – Des gâteaux de ménage débordant de crème dorée (M.-Th. Boiteux, Les Renards cuisent au four, 1990, 31). Gâteau de ménage cuit au four (Barbizier. Bulletin de liaison de folklore comtois, n.s. 22, 1998-1999, 329).
7. Comme dessert [à la campagne avant les années 50] on avait des fruits de saison, parfois
un gâteau de ménage et le dimanche un dessert que l’on achetait. (R. Bichet, Célébration des gaudes, autrefois plat national comtois, 1983, 168.)
8. Oh, ben chez nous quand on f’sait les gâteaux d’ ménage, c’était pareil. On en donnait aux voisins, pi eux, nous en r’donnaient ça nous changeait
l’ goût… (L. Semonin, La Madeleine Proust en forme, 1984, 33.)
9. J’avais hâte de revenir car ma mère avait préparé quelques gâteaux de ménage, une pâte de brioche sur laquelle elle avait étalé une frayurea de crème, d’œufs et de sucre, avant de la confier au four déjà bien radouci. (J. Boichard,
Quand le village marchait en sabots, 1989, 24.)
a Au glossaire : Mélange d’œufs, de crème et de sucre que l’on étale sur les gâteaux de ménage avant
de les enfourner.
10. Je pourrais faire « deux trois » brioches […] ou bien « deux trois » gâteaux de ménage. (P. Jeune, « La Félicie cause au Milo », Barbizier. Bulletin de liaison de folklore comtois, n. s., 19, 1992, 259.)
11. Il n’y avait plus qu’une petite boutique d’ouverte, où il put s’acheter la valeur
d’un demi « gâteau de ménage ». (R. Dromard, Comtoiseries, 1999, 173.)
12. […] au musée de plein air des maisons comtoises de Nancray, près de Besançon […] une
vingtaine d’exposants proposeront des saveurs d’aujourd’hui riches et diversifiées :
sirops, confitures, escargots, bières, pains d’épices, vins bio, fumaisons, salés,
griottes, chocolat, biscuits, fromages et bien sûr pains et gâteaux de ménage cuits sur place. (L’Est républicain, éd. Belfort, 24 avril 1999, 119.)
V. encore, s.v. goumeau, ex. 6.
■ encyclopédie. Recette de « Gâteau de ménage » dans L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Franche-Comté, 1993, 87.
2.2. 〈Surtout Haute-Saône (Champagney), Doubs (Pays de Montbéliard)〉 gâteau de fête loc. nom. m. "id.".
13. La fabrication du pain […] s’accompagnait de véritables rites. C’était l’occasion
de faire divers gâteaux, ceux de fête d’abord, pour lesquels on enrichissait un peu de pâte avec du beurre et qu’on recouvrait
d’œufs battus et de frayure [= mélange de crème et de sucre ou de sel]. (G. Becker,
« La cuisine du Pays de Montbéliard. Essai historique et sociologique », dans Bulletin et Mémoires de la Société d’émulation du Doubs, 1976, 29.)
14. Aux inévitables légumes et pommes de terre, on ajoutait pour cette occasion [la fête
patronale d’Hérimoncourt, le 22 août] le bœuf, le veau, les andouillettes, le vin
et surtout le gâteau de fête, sucré-salé, qu’on ne faisait qu’une fois par an. (J.-P. Goux, Mémoire de l’enclave, 1986, 128-129.)
15. Le dessert […] flatterait les palais avec ses sèches* et ses gâteaux de fête. (M.-Th. Boiteux, Les Renards cuisent au four, 1990, 99.)
16. Le repas préparé pour ce jour [le 15 août, fête de Champagney] prend une importance
qui dépasse le stade du culinaire quotidien. Le menu est classique : pot-au-feu, lapin,
tartes et gâteaux de fête. (A. Jacquot-Boileau, Champagney entre 1900 et 1950, t. 1, 1997, 80.)
17. Juliette GrosClaude[,] de Présentevillers [Doubs], fine pâtissière, n’aime pas le
gâteau de fête traditionnel du Pays de Montbéliard, à cause de la crème du dessus. Aussi, elle a
une recette qu’elle tient de sa maman*. (L’Est républicain, éd. Belfort, 27 juillet 1999, 202.)
2.3. 〈Ardennes〉 gâteau mollet loc. nom. m. "brioche légère et moelleuse, cuite dans un moule cannelé, comportant une cheminée
en son milieu, dont la forme rappelle celle du kouglof". On sert souvent le gâteau mollet avec des fruits pochés, une compote, une mousse au
chocolat (J’aime la Champagne et les Ardennes, 1997, 94).
18. Si l’habitude s’est perdue de cuire son pain, on s’est réservé le droit aux bonnes
fournées de galettes* au sucre, aux fruits, ou au lard, de gâteaux mollets, côtelés et, tant ils sont gras de beurre, jaunes comme du safran. (J. Rogissart,
Le Temps des cerises, 1942, 99.)
19. On confectionnait aussi naguère dans la région une pâtisserie qu’on appelait le « gâteau mollet ». On m’a décrit l’ancien moule en cuivre tout en hauteur de ce gâteau à côtes. (A. Dhôtel,
Lointaines Ardennes, 1979, 46.)
20. Le couloir était plein de plantes vertes. […] Il y en avait sur la sellette et sur
une table ronde. Le dimanche on mettait aussi à refroidir sur cette table le « gâteau mollet » et les tartes, ça sentait bon dans le couloir, alors. (A. Collignon, Les Jonchères, 1997 [1995], 106.)
21. Tante Julienne chantonne. L’air est celui d’une marche militaire :
Gâteau mollet au petit matin, Le roi n’est pas mon cousin, Galette* au sucre à quatorze heures, La reine n’est pas ma sœur. (Y. Hureaux, Bille de chêne, 1996, 127.) ■ remarques. Bien connu, et toujours apprécié, malgré quelques exemples qui en parlent à l’imparfait.
■ encyclopédie. Voir M. Esquerré-Ancieux, Cuisine des Ardennes, 1988, 111-112 ; L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Champagne-Ardennes, 2000, 236-237.
II. [Préparation salée] 〈Ain, Rhône, Loire (Roannais), Drôme, Ardèche (Annonay), Haute-Loire (Velay).〉
1. Surtout langue courante gâteau de foie(s) (de volailles) loc. nom. m. "mets salé à base de foies de volailles réduits en purée et enrichis de crème et d’œufs
que l’on cuit au four au bain-marie et qui présente assez de consistance pour être
servi démoulé et le plus souvent nappé d’une sauce tomate ou d’un coulis d’écrevisses". Le gâteau de foies recette lyonnaise se déguste chaud, tel quel sans aucun accompagnement (L. Fargues, Mes petites astuces pratiques, 1997, n.p.). Le gâteau de foie est meilleur avec une sauce tomate (MichelRoanne 1998). Gâteau de foies de volaille (Le Guide rouge 2000, 2000, 930 [Restaurant de Montrevel-en-Bresse, Ain]).
22. « Un plat a enchanté ma jeunesse », m’écrit un lecteur. Un plat que faisait sa maman* et qu’il a recherché en vain : le gâteau de foie à la lyonnaise dont il se souvient nappé d’une sauce tomate avec quenelles et olives
[…]. C’est là une des variations sur le célèbre gâteau de foie blond [sic au sing.] de Bresse […] (La Reynière, dans Le Monde, 20 juin 1987, 17.)
23. On dit les Lyonnais attachés à leurs habitudes, au gâteau de foie de volailles, au poulet sauté au vinaigre. (J.-Cl. Ribaut, dans Le Monde, 10 juin 1998, 25.)
2. cuisine hôtelière gâteau de foies blonds (de volailles) loc. nom. m. "id.". Gâteau de foies blonds de volaille (M. Guérard, La Grande Cuisine minceur, 1976, 208 ; Le Guide rouge 2000, 2000, 1561). Gâteau de foies blonds de poulardes de Bresse baigné d’une sauce aux queues d’écrevisse
à la Lucien Tendret (A. Chapel, La cuisine, c’est beaucoup plus que des recettes, 1980, 131). Gâteau de foies blonds de volaille (Le Guide rouge 2000, 2000, 1561 [Restaurant de Thoissey, Ain]).
24. Que fait tonton Albert débarquant à Mionnay [au restaurant d’Alain Chapel] ? Il passe
entre les bourriches de belons sans les voir, enjambe les buissons d’écrevisses, ignore
le homard, refuse le ris de veau […], blasphème le gâteau de foies blonds […] et s’informe avec inquiétude : « Alain, il n’y a pas de gratin aujourd’hui ? » (F. Deschamps, Croque-en-bouche, 1980 [1976], 278.)
25. Auberge Bressane. A Brou, face à l’église […]. Bonne cuisine bressane (quenelles de brochet, gâteau de foies blonds bressan) mais prix élevés. (R.-J. Courtine, Guide de la France gourmande 1981, 1980, 209.)
V. encore ici ex. 22.
■ graphie. Si foie est l’orthographe unanime des sources lexicographiques régionales, foies est plus fréquent, en revanche, dans la langue écrite.
■ encyclopédie. Recettes de « Gâteau blond de foies de volailles » dans L’Encyclopédie de la cuisine régionale. La Cuisine du Lyonnais, 1980, 30 et de « Gâteaux de foies blonds » dans L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Rhône-Alpes, 1995, 501 et LarGastr 1996.
◆◆ commentaire. Absentes des dictionnaires généraux contemporainsa (et de FEW 17, 547a-b, *wastil), mais enregistrées dans les relevés de régionalismes de leur aire, les lexies ici
traitées, toutes de formation française, sont cependant largement documentées chez
les auteurs régionaux et dans la littérature touristique et/ou gastronomique récente.
I.1. La lexie gâteau à la broche est attestée dep. 1877 dans C. Durand, Le Cuisinier Durand, Paris, Garnier, 297 ; cf. L’Inventaire du patrimoine culinaire. Midi-Pyrénées, 88. I.2. Le français du Doubs (BoillotGrCombe 1910, 154b) et de Lorraine (L. Bertrand, Jean Perbal, 1925, 149 et 184) ont naguère connu l’emploi de gâteau "tarte (aux fruits)", toujours en usage en Suisse romande (DSR 1997 ; Lengert 1994 ; LengertAmiel) ; en
Ardenne belge, gâteau de ménage a été relevé comme synonyme de gâteau mollet (également en wallon, v. FrancardBastogne 1994, s.v. gatô). I.3. Attesté dep. 1914 « Gâteau mollet. Cette pâtisserie est de toutes les fêtes. La pâte ressemble à celle de la brioche
[…]. La forme est toujours la même : un dôme à surface côtelée s’élevant sur une base
lisse plus ou moins haute. Ce gâteau s’est appelé autrefois gâteau à la royale » O. Guelliot, Les pâtisseries populaires, Reims, 32) ; « traditionnels dans les Ardennes belges et françaises », les gâteaux mollets étaient naguère associés à la Saint-Éloi (Enquêtes du Musée de la vie wallonne, t. 2, 1932, 163 ; comm. de M. Tamine).
II. Attesté dep. 1892 (« Le gâteau de foies blonds de poulardes de la Bresse, trempé d’une sauce aux queues d’écrevisses à chair pulpeuse,
est une des béatitudes de la gourmandise » Lucien Tendret, La Table au pays de Brillat-Savarin, réimpr. Paris, 1972, 70) et 1928 (« Le gâteau de foie de cochon de grand’mère » A. de Croze, Les Plats régionaux de France, 161), ce type lexical occupe une aire typiquement lyonnaise ; la dérégionalisation
de gâteau de foie de volaille (cf. gâteau de foie de volailles, TLF, sans marque), du fait de l’adaptation de la recette traditionnelle dans la haute
cuisine, est entamée.
a À l’exception de gâteau de foie de volailles dans TLF t. 9, 115a.
◇◇ bibliographie. (I.2.) BlochVosgesMérFr 1921, 131 « l’expression “gâteau de ménage”, expression qui est à rapprocher du fr. pain de ménage et faite sur ce modèle » ; DromardDoubs 1991 et 1997 gâteau de ménage ; ColinParlComt 1992 gâteau de ménage ; DSR 1997 gâteau à la crème (Jura). – (II) FréchetMartVelay 1993 gâteau de foie « globalement connu » ; FréchetAnnonay 1995 id. « usuel » ; FréchetDrôme 1997 id. « globalement usuel » ; MichelRoanne 1998 id. « usuel ».
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96 : Ø.
|