winstub [vinʃtub] n. f.
〈Moselle (est), Alsace〉 usuel "débit de vin, au cadre rustique et souvent exigu, proposant des plats régionaux".
1. La Winstub c’est d’abord un débit de vin caractérisé par l’exiguïté de ses locaux et son cachet
plus ou moins rustique. C’est ensuite une institution typiquement locale qui n’a pas
son pareil Outre-Rhin ou au-delà des Vosges. […] Une Winstub qui se respecte comprend au maximum une dizaine de tables […]. À toute heure on vous
sert de petits plats rapidement cuisinés : salade de gruyère, de cervelas, salade
de museau, salade* mixte, tarte à l’oignon, jambon cuit ou cru, knacks*, wädele [= jambonneau], etc. (Cl. Riegel, « Célébration de la Winstub », dans La Gastronomie alsacienne, 1969, 233-234.)
2. Qu’est-ce qu’une winstub ? Stricto sensu, un débit de vin. C’est là, me semble-t-il, que se dévoile le plus sûrement l’âme
de la ville. Ces débits de vin ont une atmosphère, un cadre, un patron, une gueule,
un caractère. C’est le lieu de refuge de l’Alsace de toujours. Là où les bourgeois
strasbourgeois – les « steckelburjer », dit-on ici –, comme les autres, se serrent les coudes, mangent, à la bonne franquette, les saucisses,
le jambon en croûte, le jambonneau, la tarte à l’oignon, aux quetsches ou au fromage,
la palette, le cervelas et le gruyère, le « bibelass käse » (le fromage blanc aux pommes de terre et à l’échalote) [v. bibeleskaes], le « saümawe » (l’estomac de porc farci), les rognons à la crème. Que sais-je encore ? (G. Pudlowski,
Je vous écris de Strasbourg, 1988, 45-46.)
3. Les winstubs sont des institutions strasbourgeoises incontournables. Si littéralement winstub signifie « débit de vins » […], concrètement, ils [sic] sont bien plus que cela. (Télérama, 19 avril 1989, 28.)
4. Visiter l’Alsace sans aller dans un [sic] winstub, c’est comme traverser l’Angleterre sans pénétrer dans un pub. Ces bars à vin, essentiellement
strasbourgeois, ont été créés à l’origine par les vignerons alsaciens pour écouler
dans la capitale [alsacienne] le trop plein de leur production. (Cuisine actuelle en décembre, n° hors série, novembre 1990, 59.)
5. La winstub se doit d’être discrète mais aussi d’une simplicité rustique de bon ton, correcte
mais pas trop cossue ; en somme ressembler à sa clientèle laborieuse et honnête […].
(Cl. Fuchs, L’Âme des winstubs…, 1996, 28.)
6. Un enquêteur venu de la France « de l’intérieur* » il y a dix ans pronostiquait la mort du genre winstub. Au contraire, celui-ci fait aujourd’hui florès. Certes, on n’y sert pas seulement
les plats de terroir ni les vins d’un seul vigneron. Mais le genre perdure de belle
manière, avec son air de taverne boisée sympathique, son exaltation de la tradition,
sa gentillesse naturelle et ses petits prix. (G. Pudlowski, dans Dernières Nouvelles d’Alsace, 13 janvier 1996, RE 2.)
7. J’ai pu constater ces dernières années, avec étonnement puis avec tristesse et même
du désarroi, le changement radical – la transformation, en réalité –, la disparition de winstubs que j’aimais bien ; tout en gardant, hélas, le nom de winstubs, elles ressemblaient à de petites tavernes ou de petites brasseries clinquantes, bigarrées,
carnavalesques, où tout attire l’œil comme à Pigalle ou à Hambourg. […] C’est ainsi
que d’anciennes winstubs près de la cathédrale ont été mutilées, dévoyées, perdant leur âme alors qu’on osait
dans d’infâmes dépliants les présenter comme ce qu’il y a de typiquement strasbourgeois !
(R. Werner, Je suis une winstub, 1996, 120.)
V. encore s.v. knack, ex. 5 ; presskopf, ex. 2, 5 et 7 ; rossbif, ex. 5 ; salade, ex. 3 ; stammtisch, ex. 2, 4-5.
■ morphologie. Le mot est habituellement féminin (les contre-exemples dans les ex. 3 et 4 ont été
recueillis sous des plumes de journalistes étrangers à la région).
■ remarques. Selon les Pages jaunes de l’annuaire téléphonique, 23 restaurants du Bas-Rhin et 19 du Haut-Rhin portent
Winstub dans leur enseigne.
◆◆ commentaire. Transfert non adapté de l’alsacien, où le mot semble relativement récent (absent de
SchmidtStrasbourg 1896 et de MartinLienhart 1907 ; GuizSpethDialect 1991 wi(n)stub ; cf. allemand weinstube f., de même sens, littéral. "pièce à vivre où l’on boit du vin", attesté dep. 1650 dans Grimm). La dérégionalisation de ce mot est commencée par
la voie du tourisme et des médias, mais le référent est caractéristique et emblématique
de l’Alsace.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : Bas-Rhin, 100 % ; Moselle (est), 90 % ; Haut-Rhin, 60 %.
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