galette n. f.
1. [Mets à base de pâte cuite au four ou dans la poêle]
1.1. 〈Vendée, Deux-Sèvres〉 vieilli galette (de Pâques) ou vx galette pacaude "brioche traditionnelle de Pâques". Four qu’on utilisait pendant l’Occupation pour cuire la galette de Pâques (L. Gaborit, Quand on était petits à la Tranchelardière, 1998, 65). Faire ses galettes pâcaudes [sic] est un rare privilège que tentent de maintenir une poignée d’anciens agriculteurs
attachés à leurs traditions (J.-P. Bertrand, Pains et Gâteaux traditionnels de Vendée, 1999, 252).
1. Enfin la galette est retirée [du four]. Elle n’est jamais aussi réussie qu’on l’avait espéré. Elle
est même un peu brûlée sur les bords […]. Elle est, aussi, bien moins gonflée que
le levain ne le laissait prévoir […]. Mais telle qu’elle est, malgré ses défauts,
on la déclare bonne et belle. Et c’est vrai, car la galette pacaude porte en soi sa qualité. (J. Yole, Chronique d’une civilisation, 1977 [av. 1956], 40.)
2. galette paquaude [sic] ou pain de paques. / Composition : Pâte à pain, beurre, œufs, sucre, fleur d’oranger. / Se fait pour Pâques et Quasimodo,
d’où son nom, et s’offre entre voisins. (J.-E. Progneaux, Recettes gastronomiques de Vendée et du Marais poitevin, 1977, 117.)
3. La tradition familiale de la galette pacaude […] s’éteint à l’aube du xxie siècle. Seuls quelques intéressés, attachés à la symbolique du gestuel et aux plaisirs
festifs familiaux et amicaux que cette production provoque, sont encore motivés. (J.-P. Bertrand,
Pains et Gâteaux traditionnels de Vendée, 1999, 154.)
— En alternance avec brioche.
4. […] les premières restrictions […] se concrétisèrent [en 1940] par l’interdiction
de vendre des croissants et des brioches dans les boulangeries […]. / Tante Victorine
n’était pas la dernière à proclamer à qui voulait l’entendre :
– Eh bien, si les boulangers ne font plus de brioche, on la cuira nous-mêmes. Il ne manquerait plus qu’ils nous suppriment la galette pâcaude [sic], pendant qu’ils y sont. (M. Ragon, Ma Sœur aux yeux d’Asie, 1982, 198.) 1.2. 〈Vienne, Charente-Maritime, Charente〉 usuel "gâteau sec à la farine, aux œufs, au beurre et au sucre (souvent une pâte sablée),
parfois parfumé avec de petits morceaux d’angélique". La galette rhétaise [sic], sœur de la galette charentaise (Cuisine actuelle, juillet 1992, 61).
5. La galette charentaise. C’est peut-être le plus célèbre et le plus connu des gâteaux charentais,
parce qu’il a été commercialisé. On le déguste à toute heure, aussi bien à l’apéritif
avec le pineau qu’avec le café ou dans l’après-midi. (J.-E. Progneaux, Les Spécialités et recettes gastronomiques charentaises, 1980, 154.)
■ encyclopédie. V. L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Poitou-Charentes, 1994, 105-106.
1.3. 〈Deux-Sèvres〉 galette dans la poêle "galette d’environ 1 cm d’épaisseur, faite de pâte brisée (au beurre, au saindoux ou
même à la graisse d’andouille) cuite à la poêle et que l’on retourne, mais sans la
faire sauter comme une crêpe, en raison de l’abondance de matière grasse" (RézeauOuest 1984).
2. [Mets à base de pâte contenant une garniture et cuit au four]
2.1 〈Ardennes, Lorraine surtout (nord)〉 "abaisse de pâte levée ou feuilletée, de forme ronde, avec rebord, remplie de divers
ingrédients, que l’on cuit au four et que l’on mange en dessert". Stand. tarte. – La galette aux groseilles (Chr. Ryelandt, Mémoires de Victor Droguest, le roi des contrebandiers, 1951, 161.)
6. […] et la galette aux pommes, que ne manque jamais de cuire ma mère : c’est un rite ! (Th. Malicet,
Debout, frères de misère, 1962, 47.)
V. encore ici ex. 13 ; s.v. gâteau, ex. 18.
— En part. galette au sucre. Synon. région. tarte* au sucre.
7. Il y a aussi la galette au sucre, sous deux espèces, l’une feuilletée à double croûte, l’autre invraisemblablement
mince et si dure qu’on ne peut l’entamer avec un couteau. Alors, pour partager cette
galette on tape au milieu, et on la nomme, pour cette raison, la « galette à coups de poing ». (A. Dhôtel, Lointaines Ardennes, 1979, 46.)
8. La spécialité pâtissière régionale, cette fois la vraie, était la galette au sucre. C’était une pâte à base de levure de boulanger, qu’on laissait lever dans son moule.
Avant de l’enfourner on y mettait force sucre et beurre ; ce gâteau traditionnel accompagnait
tout naturellement la tasse de café. (G. Petitfaux, Les Nonnettes, 1993, 73.)
9. Pour moi, la salle* compte deux merveilles. La première, céleste, éternelle, c’est la décoration du plafond :
bouquets de lilas, guirlande de lierre plus vrais que nature. L’autre merveille, hebdomadaire
seulement, c’est la galette au sucre du dimanche : chaque samedi soir, grand-mère l’expose sur le guéridon. (Y. Hureaux,
Bille de chêne, 1996, 27.)
V. encore s.v. gâteau, ex. 18 et 21 ; wassingue, ex. 2.
■ encyclopédie. Recette de « Galette au sucre » (à pâte briochée) dans L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Champagne-Ardenne, 2000, 236.
2.2. 〈Lorraine (nord).〉
— galette lorraine loc. nom. f. "abaisse de pâte à pain, de forme ronde, avec rebord, garnie d’une préparation à base
d’œufs, de crème ou de lait et parfois de lardons, que l’on cuit au four et qui se
consomme en entrée chaude".
10. Galette lorraine. 1 boule de pâte à pain, 3 œufs, 1 bol de crème fraîche, du beurre, sel et poivre.
Etendez la pâte au rouleau, en garnir un grand plat à tarte beurré, disposez quelques
lamelles de beurre sur la pâte, puis le mélange des œufs et crème assaisonnés. Passez
à four chaud le temps de dorer et de faire gonfler la galette 15 mn environ. (J.-M. Cuny,
La Cuisine lorraine, 1975, 43.)
11. C’est la fameuse galette ou quiche lorraine qui, avec les choux, a valu autrefois une réputation méritée aux boulangers de Pont-à-Mousson.
(La Revue lorraine populaire, n° 66, 1985, 302.)
■ remarques. Proche de la quiche, cette préparation est parfois confondue avec elle (v. ici ex. 11 et J.-M. Cuny, La Cuisine lorraine, 1975, 42 : « La quiche était souvent confondue avec la galette lorraine »).
— galette à la flamme "id.".
12. La galette à la flamme (notre chalande) se fait les jours où l’on cuit ; c’est un régal. Son nom vient de
ce qu’on la met au four avant le pain, et lorsqu’il y flambe encore quelques brandons.
(La Revue lorraine populaire, n° 66, 1985, 302.)
— 〈Aussi Ardennes〉 galette au lard "id.".
13. La galette à la bouillie est recouverte d’un mélange de lait, œufs, farine et sucre.
Le mélange, moins épais, n’est pas sucré quand il s’agit de la galette au lard. (J. Babin, Les Parlers de l’Argonne, 1954, 376.)
V. encore s.v. gâteau, ex. 18.
■ encyclopédie. Recette de « Galette au lard » dans L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Champagne-Ardenne, 2000, 190.
2.3 galette au/de goumeau*.
2.4. 〈Ain〉 "gâteau rond et plat à base de pâte briochée, garni de crème et de sucre". La galette bressane se retrouve presque partout dans le département de l’Ain (L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Rhône-Alpes, 1995, 105).
■ encyclopédie. V. L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Rhône-Alpes, 1995, 105-106.
3. [Mets à base de pâte levée ou brisée] 〈Basse Bretagne〉 souvent au pl. "beignet (frit dans l’huile)" ; "petit gâteau sec de forme arrondie cuit au four". Les galettes de Pont-Aven.
14. Galettes bretonnes / […] Pétrir jusqu’à ce que la pâte soit lisse et ferme […]. En faire une
boule et l’aplatir au rouleau puis la découper avec un emporte-pièce ou un verre.
Dorer le dessus de chaque galette avec un jaune d’œuf. (S. Morand, Cuisine populaire de Bretagne, 1982, 30.)
15. Abbaye La Joie Notre-Dame / 56800 Campénéac […] un paisible couvent où les Sœurs fabriquent
mille prétextes à pécher par gourmandise : gâteaux bretons, galettes (34,30 Frs la boîte métal de 450 g) […]. (É. de Meurville & M. Creignou, Le Guide des gourmands 1991, 1990, 330.)
V. encore s.v. kouign-amann, ex. 4-5.
■ encyclopédie. Recette de « Galettes bretonnes » dans S. Morand, Cuisine populaire de Bretagne, 1982, 30). V. L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Bretagne, 1994, « Galette bretonne », 90-91 et 400.
4. [Mets à base de pâte non levée cuite sur une crépière] 〈Basse-Normandie, Haute Bretagne, Mayenne, Sarthe.〉
4.1. galette de blé noir / de sarrasin "crêpe salée de farine de sarrasin".
16. Des voitures, on descendait les paniers de provisions et tout allait en commun : œufs
durs, poulets froids, gruyère, rillaux*, rillettes, thon et sardines à l’huile, confitures, beurre frais et gâteaux de Savoie,
vin et limonade, sans oublier les galettes de blé noir froides qu’on égrenait dans une bolée de cidre, comme les Bretons (d’ailleurs, sur
la Blisière, on n’était plus en Anjou, mais en Bretagne). (P. Froger, Autrefois… chez nous, 1950, 168.)
17. Il faut dire qu’alors les besoins étaient modestes : les repas, dans un grand nombre
de familles, se composaient d’une « bonne » soupe bi-quotidienne, de galettes de blé noir et de tartines bien beurrées, à discrétion, pour les femmes et les enfants, pour
les hommes, d’un « bout » de saucisse, de pâté, d’une sardine fricassée mangée sur le pouce, arrosés de plusieurs
bolées de cidre. (Bl.-M. Depincé, Au Carillon de l’Ouest, 1975, 11.)
18. Mais les vieux disaient que l’essentiel du repas, dans leur jeunesse à eux, était
encore constitué par les galettes de blé noir et les bouillies d’avoine, le pain blanc étant de récente conquête, nonobstant la
réputation fromentale du Trégorrois. (M. Le Lannou, Un bleu de Bretagne, 1979, 47.)
19. Il y a les galettes de blé noir, dégoulinantes de beurre. Et la bouillie de blé noir, moulée dans l’assiette. On y
fait un trou qu’on appelle le puits. On y met le beurre à fondre. On y trempe une
cuillerée de bouillie refroidie. C’est bon. Impossible de tout manger. Ça tient trop
au ventre. (G. Mercier, Le Pré à Bourdel, 1982, 54.)
20. J’ai aimé, certes, par la suite, le Nantes reclus, encapuchonné, des pesantes brumes
d’hiver, le dé perforé, rougeoyant à tous ses trous, au coin des rues, du brasero
des marchands de marrons grillés et des marchands de galettes de blé noir. (J. Gracq, La Forme d’une ville, 1985, 27.)
— Emploi non-comptable.
21. […] le sujet central du dernier numéro de Côté Ouest intitulé « Pique-nique sur l’île d’Yeu entre cousins-cousines », met en scène une abondante tribu aux joues rouges, avec paniers, épuisettes et chapeaux
de paille. Galette de blé noir et pâté Hénaff partagés… (Le Point, 27 juillet 1996, 77.)
V. encore ici ex. 26.
■ encyclopédie. V. L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Bretagne, 1994, « Galette de blé noir », 104-107 et « Galette de sarrasin », 395.
4.2. Absol. galette "id.".
22. En roulant de la saucisse chaude dans les galettes, la Yande demanda subitement au fils […] (R. Vercel, La Caravane de Pâques, 1988 [1948], 486.)
23. Elle commença à déplier des galettes et les mettre à frire dans la poêle par terre, au milieu de la maison, sur le petit
feu calme. (A. de Tourville, Jabadao, 1951, 262.)
24. Et tu tournais vaillamment le moulin ensuite, parce que je t’avais promis la dernière
galette, le galichon, avec des dessins en dentelle. (P. Lebois, Terre dévastée, 1965, 152.)
25. Plus loin, on grillait des saucisses, à manger avec des galettes, on se brûlait les mains aux châtaignes harassées [= grillées] en public. (P. Lebois,
Les Trois Amoureuses de Villeclaire, 1968, 244.)
26. La galette de blé noir demeure une des spécialités de la Haute-Bretagne où, même de
nos jours, il n’y a pas de fête populaire sans marchande de galettes. (Y. Meynier et J. de Roincé, La Cuisine rustique, Bretagne, Maine, Anjou, 1970, 184.)
27. En 1935, il était revenu à la maison, pour y manger les galettes, dont il raffolait, et nous avait proposé que j’aille passer l’hiver chez lui, au
pays du soleil. (J. Doré, Recteur breton, 1979, 34.)
28. La Mayenne, c’était drôlement arriéré. Il n’y a pas très longtemps, dans certains
coins, on battait encore le sarrasin au fléau. On ne cultive plus beaucoup cette céréale
mais à l’époque on en consommait énormément sous forme de galettes avec du beurre salé. (J. Guillais, La Berthe, 1990 [1988], 222.)
V. encore s.v. bourdon, ex. ; goule, ex. 24 ; lait-ribot, ex. 8 et 13 ; lard, ex. 5 ; tuile, ex. 1-2, 4-5.
— Emploi non-comptable et générique.
29. Veux-tu manger de la galette ? J’en ai cuit « à » matin. Et le beurre est d’hier. J’ai toujours mon moulin à blé noir, tu sais, avec
ma claie et mon tamis. Je suis très conservatrice : je garde les traditions. Je vis
surtout de galette, de beurre et de lait baratté. Et ma galette, c’est de la galette, c’est-à-dire de la nourriture, et pas des oublies transparentes comme celles des
commerçantes rennaises qui vendent ça pour des crêpes aux « bobias » de touristes. (P. Lebois, Terre dévastée, 1965, 151.)
30. […] un peuple de Bretons entreprenants, de touristes plus ou moins naïfs à plumer,
une espèce de bouillon de culture fleurant la friture, la moule farcie, la galette bretonne, le pain chaud, le café des tropiques et le commerce qui n’a pas d’odeur.
(C. Paysan, L’Empire du taureau, 1982 [1974], 203-204.)
31. Une vie d’il y avait très longtemps. Une vie qui ressemblait à l’enfance. Et des odeurs
de galette. De beurre fondu, avec le goût du sarrasin. (G. Guicheteau, Les Gens de galerne, 1983, 225.)
V. encore s.v. lait-ribot, ex. 1, 7, 9 ; tuile, ex. 2 et 8.
— En appos. 〈Haute Bretagne〉 galette-saucisse "saucisse grillée roulée dans une crêpe de sarrasin".
32. Ma Bretagne n’est peut-être ni plus belle ni plus pure que d’autres terres, mais je
l’aime bien malgré ses souillures et ses sautes d’humeur. J’y vis entre plages et
forêts, entre l’usine et les petites villes où l’on n’est jamais anonyme. J’aime l’odeur
du chou dans les maisons, le porc qu’on mange sur les toiles cirées, les « galettes-saucisses » enveloppées de papier sulfurisé. (D. Letessier, Le Voyage à Paimpol, 1980, 26.)
33. Les Franciscaines missionnaires […] organisent, les samedi 11 et dimanche 12, leurs
journées d’amitié. […] à midi, galettes-saucisse, frites, pâtisseries […]. (Ouest-France, éd. Saint-Brieuc, 11-12 octobre 1997, SBR 16.)
V. encore ici ex. 35.
— [Dans la restauration] 〈Haute-Bretagne〉 Dans le syntagme galette complète "crêpe de sarrasin garnie de plusieurs ingrédients (saucisse, œuf, jambon, fromage,
etc.)".
34. Pour faire une galette dite « complète », placer une tranche de jambon sur la galette. […] Casser un œuf sur la galette et
laisser cuire […]. Une fois l’œuf cuit, saupoudrer d’un peu de gruyère râpé et plier
la crêpe en quatre. (Guides Gallimard. Bretagne, Côte d’Emeraude, 1992, 78-79.)
35. Une fête de la bière, avec une choucroute en dansant la valse des neiges : « Et voilà comment s’ouvrent les portes de l’Alsace voisine ». On connaît les soirées, l’ambiance, avec le petit Riesling qui vous fait tourner
la tête. Samedi soir à Roppe, la Forêt noire avait été pour une fois laissée de côté.
Place aux rives bretonnes, à sa musique et à son folklore, à ses galettes complètes, à ses galettes saucisses, à ses crêpes et à son cidre qui coule à flot. (L’Est républicain, éd. Belfort, 25 novembre 1996, 256, col. 2.)
■ encyclopédie. « Recette de la galette » dans S. Morand, Gastronomie normande, 2000 [1970], 307-308.
5. 〈Haute Bretagne, Sarthe〉 spor. pierre à galettes loc. nom. f. "poêle en fonte, munie ou non d’un manche, à rebord très peu élevé, pour cuire les
crêpes de farine de sarrasin". Synon. région. galet(t)ière*, galet(t)oire*, tuile* à galettes.
■ dérivés.
1. 〈Basse-Normandie, Bretagne, Mayenne, Sarthe〉 galet(t)ière n. f. "poêle en fonte, munie ou non d’un manche, à rebord très peu élevé, pour cuire les
crêpes de farine de sarrasin". « Ma mère installe sur le trépied la galettière qui est une plaque de fonte très large (70 cm). Elle la chauffe d’abord avec un feu
d’aiguilles de pin, de sciure de bois, d’ajonc sec ou de fagot menu. Ce feu, elle
le surveille de près pendant qu’elle fait la pâte dans la bassine de terre avec ses
seules mains. Elle crache sur la galettière pour s’assurer qu’elle est chaude à point (le feu purifie tout) puis elle l’essuie
et la graisse avec le lardig, un torchon qui repose dans un vieux bol garni d’un mélange de saindoux et de jaune
d’œuf. Tout est prêt » (P.-J. Hélias, Le Cheval d’orgueil, 1975, 394) ; « Mais il manque les crêpes et leur inséparable cidre à cette balade bretonne. Faites
de farine de sarrasin, elles s’appellent galettes*, se cuisent sur une galetière graissée au saindoux et on a pour habitude de les servir salées avec des œufs, du
lard, des saucisses… » (Cuisine actuelle, n° 17, mai 1992, 60) ; « Les galettes* de blé noir ont fait la réputation de la Bretagne […]. […] on les cuit sur la galetière (ou galetoire) – autrefois chauffée sur les braises de la cheminée – graissée avec un peu de saindoux.
[…] une poêle spéciale (galetière) très large et pratiquement sans bord » (L’Inventaire du patrimoine culinaire de la France. Bretagne, 1994, 395) ; « On faisait des crêpes de la grandeur de la galetière. Ce n’était pas les petites crêpes de maintenant ! » (Chr. Leray et E. Lorand, Dynamique interculturelle et autoformation. Une Histoire de vie en pays gallo, 1995, 267).
2. 〈Basse-Normandie, Haute-Bretagne, Mayenne, Sarthe〉 galet(t)oire n. f. "id." « Et la Julie de se mettre en frais… De sortir la galettoire, de la graisser, d’y répandre la pâte blanchâtre du gruau de sarrasin… » (J. Rolland, Nanon, fille du Sillon, 1946, 33) ; « La cheminée s’emplissait de l’odeur chaude du saindoux qui fondait dans la galettoire […] » (S. Anne, Victorine ou le Pain d’une vie, 1985, 41-42) ; « Seules les régions touchant le Bas-Maine, qui lui-même touche la Bretagne, consomment
les galettes* de sarrasin, cuites sur une galetoire de fonte » (A. Fillon, Louis Simon, villageois de l’ancienne France, 1996, 135). « Et le jour des galettes*, le vendredi, […] je demeurais tout le repas debout devant la gazinière à soulever
de la main gauche la lourde galettoire de fonte noire que j’inclinais dans tous les sens afin d’y étaler uniformément la
pâte qui tombait lentement de la louche tenue de l’autre main […] » (J. Rouaud, Sur la scène comme au ciel, 1999, 39-40).
◆◆ commentaire. Les sens classés sous 1 sont des modalités particulières, dues aux spécificités des référents, du français
général galette "gâteau rond et plat, à base de farine ou de féculents, cuit au four ou à la poêle" (NPR 1993). Les types classés sous les rubriques suivantes dénomment des mets de
forme ronde et plats, mais distincts par les ingrédients, la préparation de la pâte
ou le mode de cuisson. Dans ceux rangés sous 2, galette a la valeur de tarte en français commun (LanherLitLorr 1990 ; TamineArdennes 1992 ; PohlBelg 1950 « région. » ; « bien connu en Gaume » comm. de M. Francard), valeur attestée par son emploi continu comme définissant de
quiche dans les glossaires dialectaux de Lorraine (LabourasseMeuse 1887 ; VarletMeuse 1896 ;
ZéliqzonMoselle 1922) et peut-être due à un changement de pratique culinaire : jusqu’à
l’époque contemporaine s’est maintenue la pratique de faire cuire à la flamme dans
le four à pain de minces galettes de pâte à pain, éventuellement enrichies d’une garniture,
cf. flamiche*, flammekueche*, all. région. Flammenkuchen, qui ont, d’évidence, partie liée avec galette à la flamme. Le type tarte* flambée, par les variantes transitoires tarte flammée et tarte à la flamme, s’inscrit dans cet ensemble, cf. le définissant, par hypercorrectisme, "tarte à la flamme" de flamiche (BruneauEnqLingArdenne 1926, 345). Un équivalent tout à fait indépendant de galette au sens de "beignet" (type 3) a été relevé en auvergnat (FEW 4, 43a) ; les deux sens classés sous ce type, et notamment le sens "petit gâteau sec" pourtant largement diffusé (mais dont les locuteurs en dehors de la Bretagne semblent
avoir une connaissance surtout passive) ainsi que le référent, ne sont guère pris
en compte par la lexicographie générale (Lar 2000, sans marque).
L’emploi de galette pour dénommer une crêpe (type 4) est un régionalisme enregistré dep. Littré 1865 (« en Normandie, en Bretagne et ailleurs ») et documenté dep. 1804 dans le composé galette de sarrasin (Marmontel, Littré ; 1848, Flaubert, Frantext), ou galette de blé noir (LeMièreRennes 1824 ; 1832, Maurice de Guérin, Frantext). Cet emploi est plus anciennement attesté dans les dénominations de la poêle spéciale
utilisée pour les cuire : pierre à gal(l)ette (dep. 1705, Hav), tuil(l)e à galette (dep. 1706, Hav), et, dès la deuxième moitié du 18e s., galette est utilisé pour dénommer en français le même mets dans des régions comme l’Auvergne
et le Limousin où il porte des noms dialectaux différents, v. HöflerRézArtCulin et
le cas de Marmontel, né à Bort-les-Orgues (Corrèze), qui a fait ses études à Mauriac
(Cantal) et Clermont (Puy-de-Dôme). Cette diffusion précoce est confirmée par l’emploi
courant du composé galette de sarrasin au Québec (ALEC 236 ; DFPlus 1988), où galette comme nom d’une crêpe est attesté dep. 1843 en anglo-canadien (À Dictionary of Canadianisms on Historical Principles, v. Juneau TraLiQ 1, 152 ; dans la lexicographie dep. Dunn 1880). Le composé galette de blé noir est bien attesté en Haute Bretagne, mais, comme en Basse-Normandie et dans le Maine,
le simple galette y est plus courant en français, même là où le nom dialectal est d’un type différent
comme dans les Côtes d’Armor. Cependant le terme n’est pas passé en ce sens dans le
français de Basse Bretagne où on utilise crêpe (v., par exemple, s.v. lait-ribot, ex. 3, 6 et 10) ou crêpe de blé noir (Proust, Frantext ; 1931, R. Bazin, Magnificat 60), en accord avec le breton qui emploie krampouez quelle que soit la farine. Lorsque l’on fait une distinction, elle est relative à
l’épaisseur de la crêpe. Ainsi Hélias oppose la galette (de froment) (traduisant breton kaletezenn) « épaisse » à la crêpe (traduisant breton krampouezenn) « fine et légère », mais emploie concurremment les composés tuile à galettes ou tuile à crêpes et le dérivé galettière (traduisant tous deux breton pillig), v. P.-J. Hélias, Le Cheval d’orgueil, 1975, 394-397 et Marh al lorh, 1986, 380-383.
La pluralité des dénominations françaises de la poêle spéciale (5) n’est pas récente : pierre à galette (1705, ci-dessus), tuile à galette (1706, ci-dessus ; LeMièreRennes 1824), tuile (CoulabinRennes 1891 ; TuaillonRézRégion 1983, Saire), galet(t)ière (enregistré comme dialectalisme de l’Orne par Duméril 1849 ; utilisé comme définissant
de galetoire par DuBoisTravers 1856 ; dans la lexicographie française dep. Littré 1865 ; PicquenardQuimper
1911, 769), galettoire (enregistré comme dialectalisme de Normandie dep. DuboisTravers 1856 ; dans la lexicographie
française dep. Littré 1865 ; EudelNantes 1884). Le type tuile à galettes est expliqué par le matériau qui aurait été utilisé pour fabriquer l’objet (« Anciennement cet ustensile de ménage était en terre cuite » CoulabinRennes 1891) ou par une analogie de forme avec une tuile plate (FEW 13/1, 156b, tegula). L’existence du synonyme pierre à galettes ne plaide pas pour cette dernière solution. Le fait que le même ustensile soit dénommé
dans le Cantal, de façon parallèle, par les représentants dialectaux de tegula (ibid. ; ALMC 786*) va dans le même sens. D’ailleurs la pratique de cuire une mince galette
de pâte à pain étendue sur une authentique tuile, préalablement chauffée dans le four,
est attestée en Anjou (« Le jour où la métayère boulange, elle prend une poignée de pâte à pain et une tuile
propre. Elle met la tuile à l’orée du four et roule sa pâte de façon que celle-ci
puisse recouvrir celle-là. Quand la tuile est bien chaude, la métayère la retire,
étend sa pâte dessus et enfourne sans perdre de temps. Cinq minutes de cuisson, et
la galette est à point » CormeauMauges 1912, t. 1, 366) et en Vendée (v. P. Rézeau, Un patois de Vendée. Le parler rural de Vouvant, 1976, § 323). Si le mode de cuisson premier des crêpes de sarrasin dérivait d’une
telle pratique, cela expliquerait l’emploi de tuile pour dénommer la poêle spéciale utilisée ultérieurement pour les cuire, mais aussi
l’emploi de galette pour dénommer la crêpe.
◇◇ bibliographie. FEW 4, 43a, *gallos ; P. Brasseur, « Galettes et crêpes dans les départements du Calvados et de l’Eure », dans ColloqueCaen 1975, 6-18 ; TuaillonRézRégion 1983 ; RézeauOuest 1984 ; LepelleyBasseNorm
1989 ; LanherLitLorr 1990 ; TamineArdennes 1992 ; LepelleyNormandie 1993 ; BlanWalHBret
1999.
△△ enquêtes. EnqDRF 1994-96. Taux de reconnaissance : ("crêpe de sarrasin") Calvados, Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, Orne, Manche, Sarthe,
100 %. ("beignets" pl.) Finistère, 80 % ; Morbihan, 75 % ; Côtes-d’Armor, 65 %. (pierre à galettes) Ille-et-Vilaine, 75 % ; Sarthe, 30 % ; Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, 0%.
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